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Le 17/04/2018
Il est né le 19 décembre 1877 à Chichery (89), fils de TRUCHY Louis Octave Adrien et BENOIT Zélie Olympe. Marié le 27 septembre 1902 à Fleury avec BARJOT Marie Blanche. Avant la guerre, il travaillait comme cultivateur.
Adrien arrive le 16 août 1914 le 5e bataillon territorial du génie d’Orléans. La composition du régiment de génie est très complexe, chaque compagnie peut être dans un lieu différent et ne connaissant pas sa compagnie, il est impossible de retracer son parcours.
CPA de l'hôpital temporaire de Béziers
Adrien est mort le 21 décembre 1914 à l’hôpital temporaire n°38 de Béziers, de la fièvre typhoïde. Sa sépulture se trouve, d’après le registre des concessions, à Fleury mais la tombe ne comporte pas de plaque.
Un secours de 150 francs est accordé à sa veuve, Marie. A titre de comparaison, un obus de 120, en mai 1917 coûte 120 francs et équivaut à 30 861 € d’aujourd’hui.
Le 17/04/2018
Il est né le 21 mars 1893 à Fleury, fils de VINOT Camille et FAVROT Flore. Jamais marié. Avant la guerre, il travaillait comme boucher.
VINOT Constant est au 4e régiment d’infanterie, dans la 5e compagnie, en train de faire son service militaire quand la guerre éclate. Il quitte, avec son régiment, Auxerre le 5 août 1914. Un bataillon détaché à Troyes est conduit directement au point de concentration. Le 6 août, le régiment débarque à Sampigny et gagne Woinville, où il reçoit l’ordre de s’installer défensivement face à Metz. Le 21, après avoir parcouru 40 kilomètres sous une chaleur accablante, il gagne la frontière belge. Le régiment a pour objectif, le 22, Mussy-la-Ville. La marche s’exécute dans un brouillard intense. Deux bataillons partent à l’assaut avec entrain, mais l’ennemi, bien retranché, les accueille par un feu terrible. Sous le nombre et la mitraille, il faut se replier. Le soir, quand les débris du régiment se regroupent à la ferme de Bouillon, l’étendue des pertes est immense : 18 officiers et 1200 hommes hors de combat.
image d'illustration - Front de Baranzy à 3km de Signeulx
Constant est mort le 22 août 1914, avec de nombreux camarades dont GUISARD Fernand. Il repose au cimetière de Fleury.
Citation pour la médaille militaire publiée au journal officiel du 29 février 1928 : « brave soldat. Glorieusement tué le 22 août 1914 à Signeulx (Belgique). Croix de guerre avec étoile de bronze ».
Le 13/11/2017
Né le 27 mai 1882 à Paris 12e Arrondissement, fils de BISCHOFF André et ZIPPER Anne Marie. Marié le 29 octobre 1910 à Fontenay-sous-Bois avec TAVERNIER Hélène. Ils auront un fils ensemble : BISCHOFF René André, né le 3 septembre 1911 à Paris 4e Arrondissement. Avant la guerre, il travaillait comme fourreur.
A ses 20 ans, Victor est appelé pour servir dans la classe 1902 avec le matricule 4285 au 4e Bureau de la Seine (Paris). Il intègre le 148e Régiment d’Infanterie le 16 novembre 1903. Son service se termine le 18 septembre 1906 et il obtient son certificat de bonne conduite
Victor est mobilisé le 12 août 1914 dans le 246e régiment d’infanterie. Le régiment est parti de son dépôt de Paris, le 10 août 1914, pour la base de concentration à Saint-Mihiel (55), sous les ordres du lieutenant-colonel Chaulet et comprenait deux bataillons : le 5e et le 6e ; il appartenait à la 110e Brigade, 55e Division, 5e Groupe de Divisions de Réserve, IIIe Armée. La première mission de la 55e Division est de tenir les Hauts-de-Meuse qu'elle occupe. Elle est rappelée à Saint-Mihiel le 14 août en réserve générale. Le 25 août, à 1 heure, le régiment reçoit l'ordre de quitter ses cantonnements de Viéville-en-Haye (54) (Thiaucourt), etc. La 55e Division d’Infanterie ayant pour mission ce jour-là de couvrir le flanc droit de la 56e Division d’Infanterie qui sera dans la matinée près de Jeandelize. De 1 heure à 11 heures, le régiment marche sans cesse, la chaleur est accablante. Vers 11 heures, le régiment reçoit l'ordre de continuer sa marche en avant pour participer à l'action engagée sur le front d'Etain (55). C'est la première bataille à laquelle le régiment va participer. Vers 16 heures, le régiment sort du village de Puxe (54) et s'établit dans la plaine par sections échelonnées. Les obus fusants éclatent, nombreux, tout le monde se couche ; pendant une heure les fusants arrivent, sans arrêt ; mais tous éclatent si haut qu'aucun homme n'est touché. A 18 heures, l'Armée envoie à la 55e Division l'ordre de se replier sur Labeuville (55). Il y a encore 20 kilomètres à parcourir dans la nuit à travers champs, et il marche depuis, le matin... La colonne se replie : des deux côtés de l'infanterie, dans les terres labourées, marche péniblement une colonne d'artillerie, les ambulances, les convois ; les phares de Metz éclairent le ciel dans tous les sens. Il arrive à Labeuville : dans une ferme, où cantonne tout le régiment ; tous arrivent à se placer pour prendre un peu de repos. Une compagnie est désignée pour prendre les avant-postes. Une demi-heure après l'arrivée, le silence règne sur la ferme : dans le lointain, la canonnade fait rage. Tout à coup un cri de sentinelle retentit : « Aux armes ! » En une seconde, tout le monde est debout. Les baïonnettes sont aux fusils, les culasses remuent, les fusils se chargent. Une compagnie renforce les avant-postes. Les commandements retentissent. Ils attendent quelques minutes : rien ne se produit. La sentinelle a vu des ombres : une patrouille ennemie sans doute, mais qui a disparu. Le 30 août, le 246e Régiment se met en marche vers Marquivillers (80) pour participer à l'action engagée sur le front Guerbigny-Tilloloy. A 11 h. 30, la 55e Division d’Infanterie devant se replier dans la direction générale Maignelay - Montgérain (60), le 246e Régiment d’Infanterie est maintenu sous Grivillers (80) pour protéger la retraite de deux brigades (les 109e et 110e). A 13 heures, l'ennemi débouche et aussitôt s'engage un violent combat d'artillerie ; une batterie du 13e Régiment d'Artillerie tire à vue sur une colonne ennemie qui subit de lourdes pertes : l'ennemi est arrêté dans sa marche en avant. Le régiment n'a pas de tués, seulement, quelques blessés, les premiers du régiment. Le 2 septembre, l'armée se replie vers le Sud, la 55e Division sur Creil et Chantilly. L'étape est de 50 kilomètres et l'on marche du matin à la nuit. La chaleur accablante rend l'étape particulièrement dure. A 10 heures, l'ordre arrive de passer à tout prix le pont de péniches de Villers-le-Sec (Oise) avant 13 h. 30. A cette heure, le pont sautera et malheur à ceux qui ne seront pas passés, les Allemands ne sont qu'à quelques kilomètres derrière notre colonne. On arrive en vue du pont : le général de Mainbray, commandant la 110e Brigade, surveille le mouvement, il passe lui-même et le pont saute, en grand fracas ; il n'y a plus de passage possible, et pourtant, de l'autre côté, se trouvent encore des Français : plusieurs hommes, exténués, n'ont pu continuer la marche et sont à la merci de l'ennemi. A leur droite, Senlis est en feu. Là, se termine la retraite sur Paris à laquelle vient prendre part la 55e Division. Le 5 septembre, la 55e Division reçoit l'ordre de se porter dans la région de Monthyon (77). Le 246e Régiment d’Infanterie est avant-garde de la division avec un groupe du 13e Régiment d'Artillerie. La colonne est éclairée par un peloton du 32e Dragons qui fournit régulièrement des renseignements. A 3 heures, il arrive en vue d'Iverny. Le lieutenant-colonel, commandant le régiment, prescrit à la compagnie Tournié de fouiller le village. A ce moment, on aperçoit sur la crête Nord-Ouest de Monthyon quelques cavaliers allemands, puis une forte colonne d'infanterie et d'artillerie. Les dispositions de combat sont prises rapidement : les batteries du 13e Régiment d'Artillerie, soumises à un feu violent, se mettent néanmoins en position de tir avec un sang-froid remarquable. Elles subissent de lourdes pertes, mais répondent immédiatement à l'ennemi. Jusqu'à 17 heures, sous une violente fusillade d'un tir d'artillerie ininterrompu, le 246e Régiment d’Infanterie tient en respect les forces allemandes. Les renforts arrivent, le régiment se porte en avant, charge l'ennemi qui recule et le régiment bivouaque le soir sur les lignes de défense en avant du village d'Iverny. Le régiment a eu, 10 hommes tués, 84 blessés, 10 disparus. Le 6 septembre, le régiment poursuit sa marche en avant. Des reconnaissances rendent compte que l'ennemi a évacué Monthyon pendant la nuit. Il a fui précipitamment, abandonnant matériel, caissons, obus, sans enterrer ses morts qui gisent nombreux parmi les cadavres de chevaux. Le régiment traverse Monthyon et se dirige sur Marcilly et Barcy ; il doit barrer la route à de gros éléments ennemis franchissant la Marne à Varreddes et battant en retraite vers le Nord. On marche depuis deux heures en tirailleurs ; de nombreuses patrouilles sont envoyées en reconnaissance : tout à coup, le contact s'établit avec l'ennemi : les balles sifflent, les mitrailleuses font rage, le combat est engagé et le feu atteint une formidable intensité ; l'ennemi est retranché dans des tranchées profondes à 500 mètres des hommes et le régiment progresse en terrain découvert ; à chaque bond, des hommes tombent, morts ou blessés, mais l'élan n'est pas brisé et l'on avance toujours. La charge sonne et les survivants repartent à l'assaut pour la troisième fois, malgré les mitrailleuses qui tirent sans arrêt. Les sonneries « Au Drapeau ! » « En Avant ! » retentissent, tout le monde repart et ils atteignent les tranchées allemandes que l'ennemi est contraint d'abandonner. Les pertes ont été lourdes : 800 hommes hors de combat et 23 officiers. Le 16 septembre, le régiment reçoit l'ordre de traverser l'Aisne, afin d'aller appuyer une attaque en cours. A la faveur du brouillard, le mouvement s'exécute sans difficulté, mais l'ordre arrive de se replier sur Soissons (02). A 10 heures, nouvel ordre de se porter en renfort des troupes engagées sur les hauteurs de Cuffies. Le brouillard a disparu, le mouvement est vu de l'ennemi ; le régiment est pris sous le feu de nombreuses batteries allemandes qui causent des pertes importantes ; cependant, le régiment passe, bravant la mitraille, et va occuper les positions qui lui ont été assignées. Du 17 au 18, le régiment contient l'ennemi sur les hauteurs de Soissons, en face de Cuffies et du 29 au 6 octobre, il est en cantonnement à la Montagne-de-Paris et prépare des tranchées de soutien. Le 7, le régiment reçoit l'ordre d'aller occuper les tranchées de Crouy, où il est relevé tous les quatre jours par le 289e Régiment d’Infanterie jusqu'à la mi-janvier. L'occupation de ces tranchées ne donne lieu à aucun coup de main, mais le régiment s'installe en vue d'une attaque devant avoir lieu vers le courant de janvier 1915.
Le 12 janvier 1915, à 21 heures, le 5e Bataillon reçoit l'ordre d'envoyer ses compagnies disponibles sur le plateau de Crouy, renforcer un régiment qui va attaquer les positions allemandes. La 20e Compagnie reçoit l'ordre de partir la première. Arrivée à hauteur du cimetière de Crouy, les mitrailleuses ennemies tiennent la compagnie sous leur feu. Et cependant, il faut passer mais la compagnie perd une partie de ses cadres (sous-officiers et officiers). Une section perd la moitié de son effectif. Il n'y a pas possibilité de passer aussi ; la compagnie utilise une autre direction exposée, celles-ci, aux tirs d’artilleries : la compagnie perd la moitié de son effectif, mais parvient aux emplacements qu'elle doit occuper. La 19e Compagnie arrive dans la nuit et rejoint avec le 289e Régiment d’Infanterie à l'attaque des tranchées de la Dent de Crouy ; elle donne brillamment l'assaut à une tranchée allemande et s'y maintient jusqu'au 14 au matin. Elle subit de très fortes pertes, mais garde la position. A 4 h. 30, le régiment reçoit l'ordre de se replier et vient cantonner à Droizy, où il reste jusqu'au 8 février. Ce jour-là, à 17 heures, il quitte ses cantonnements et vient relever le 42e Régiment d’Infanterie dans les tranchées de Saint-Paul – Vauxrot au Nord de Soissons, rive droite de l'Aisne. A partir de ce jour, le régiment garde les tranchées et, tous les huit jours, est relevé par le 282e Régiment d’Infanterie jusqu'au 25 février. Le 23, au cours de la nuit, une patrouille de la compagnie doit exécuter une reconnaissance de terrain et enlever une sentinelle dont l'emplacement entre les lignes est connu. La patrouille parvient à proximité de la sentinelle qui crie : « WerDa? » tire et s'enfuit. La fusillade se déclenche des lignes ennemies, la patrouille rentre dans ses tranchées ; on s'aperçoit alors de la disparition du soldat Charpentier qu'il faut aller chercher, mais l'ennemi est vigilant et au moindre mouvement déclenche des tirs importants, le lendemain le soldat Latreille s'offre à aller chercher le corps de son camarade ; à midi, il s'approche à 50 mètres des lignes ennemies et rapporte le cadavre de Charpentier. Pour cette belle action, le soldat Latreille est cité à l'ordre de la division dans les termes suivants : « Après avoir été en plein jour, à quelques pas des sentinelles ennemies, reconnaître l'emplacement où était tombé un de ses camarades mortellement blessé, au cours d'une patrouille faite la nuit précédente, est retourné chercher son cadavre et l'a rapporté sur son dos, donnant à sa compagnie un modèle de sang-froid et de mépris du danger. » Le 26, le régiment est relevé et vient en cantonnement à Montgobert et Puiseux, où il reste jusqu'au 24 mars. Du 25 mars au 16 avril, cantonnement à Droizy et Muret-et-Crouttes. Pendant cette période de repos, le régiment prend part à des exercices de remise en main et des évolutions. Le 17, il part occuper les tranchées de Sermoise, devant Missy-sur-Aisne, où il reste jusqu'au 29 avril, jour où il est relevé par une division territoriale. Le 29 avril, le régiment se met en route et vient cantonner à Oulchy-le-Château et à Crouttes, d'où il part le 9 mai, pour venir s'embarquer à Vierzy, à destination de l'Artois. Le régiment débarque à Doullens, le 10, dans la matinée, et est immédiatement transporté en automobile dans divers cantonnements près du front. Du 13 au 22 mai, il occupe différents emplacements au Nord de Carency (62) (bois 125, Ablain-Saint-Nazaire). Le 22 mai, en Artois, le régiment est mis à la disposition de la 139e Brigade. Dans la soirée, le commandant du 6e bataillon est avisé qu'une attaque sera faite le 23 entre le cimetière d'Ablain-Saint-Nazaire et le blockhaus du bois de Carency et que le bataillon y participera. Au cours de la nuit, des parallèles de départ sont créées pour porter les éléments d'attaque à 200 mètres des lignes ennemies. Ledit jour, la préparation d'artillerie commence à 12 h. 45 et dure deux heures. A 14 h. 45, dans un élan, les 21e Compagnie et 23e Compagnie sortent de leurs tranchées ; malheureusement, les tranchées allemandes n'ont pas été détruites et, dès le début de l'attaque, la fusillade ennemie éclate, le barrage d'artillerie est déclenché ; les rafales de mitrailleuses sont terribles et l'attaque est arrêtée sur place ; les hommes restent entre les lignes et ne pourront rentrer dans les tranchées françaises qu'à la nuit. Pour chaque homme qui bouge, c'est la mort certaine. Des Allemands tuent à bout portant tous les hommes qu'ils voient, A la nuit, les hommes valides rentrent, les blessés sont transportés. Les brancardiers allemands sortent de leurs tranchées et emmènent les blessés français les plus proches de leurs lignes.
Victor rejoint, le 24 mai, le 282e Régiment d’Infanterie qui est en réserve à la Maison Forestière. Dans la journée du 26, le régiment relève des éléments de deux autres régiments, dans la région au Sud de Notre-Dame-de-Lorette. Il consolide la position sous un bombardement violent. Une reconnaissance, envoyée le 28 à 20 heures, est accueillie par une vive fusillade. Une compagnie construit des tranchées de départ le long des haies qui se trouvent sur les pentes Sud-Est de Notre-Dame-de-Lorette. Le 29, le village d'Ablain-Saint-Nazaire est enlevé. Le 30, deux compagnies attaquent l'emplacement de la sucrerie de Souchez. La préparation d'artillerie n'ayant produit aucun effet sur les défenses accessoires, elles ne peuvent progresser que de quelques mètres. Elles s'accrochent au terrain et construisent dans la nuit une parallèle bientôt réunie à la tranchée de départ. Le 1er juin, deux compagnies appuyées d’un bataillon d’un autre régiment tentent une attaque mais à cause d’un manque de préparation ne peut déboucher. A partir du 2, les compagnies sont relevées petit à petit et la période de repos dure jusqu'au 15 juin, date à laquelle le régiment se rend à Grand-Servins, puis au bivouac sur la chaussée Brunehaut. Le 18, le régiment vient occuper, le sous-secteur Nord, depuis le château de Carleul jusqu'au cimetière de Souchez. La première ligne occupe la route de Béthune. Dès le 19 au soir, une compagnie tente une attaque sur l'îlot de maisons au Sud de Souchez et sur le boyau de Bavière ; accueillie par une violente fusillade, elle gagne cependant quelque terrain et fait 3 prisonniers. Le 21 juin, l'attaque est reprise. A 14 heures, sans préparation d'artillerie, deux compagnies tentent de sortir ; elles sont arrêtées par un feu des plus violents. Dans la nuit, elles sont relevées par deux autres compagnies. Dans la nuit du 22, une compagnie parvient à s'emparer d'un élément de tranchée au Nord du boyau de Bavière et à 23 h.30, une contre-attaque allemande est repoussée. Le régiment est relevé le 28 juin dans la et va cantonner à Béthonsart. En raison du bombardement violent, une des compagnies ne peut être relevée que deux jours plus tard. Le 5 juillet, le régiment remonte en ligne pour quatre jours. Il occupe le même secteur jusqu'au 23 septembre, par périodes de quatre ou cinq jours, alternant avec des périodes de repos de huit jours à Mingoval ou Béthonsart.
Victor est mort des suites de blessure à l'Hôpital auxiliaire de la Croix-Rouge de Lorient (56). Il est enterré au carré militaire du cimetière de Lorient.
Merci à GUYADER Jacqueline pour la photo.
Victor reçu à titre posthume la médaille militaire : « Bon soldat courageux et dévoué, qui s'est fait remarquer par sa belle conduite au feu. Mort courageusement pour la France le 1er juillet 1915. »
Il a donc pour ceci, droit à la médaille militaire ainsi qu'à la croix de guerre avec étoile de bronze (exemple ci-dessous)
Le 13/11/2017
Né le 28 mars 1896 à Fleury-la-Vallée, fils de MARY Jules Anthanase et RICHARD Berthe et frère de MARY Artésien. Marié le 21 janvier 1922 à Fleury-la-Vallée avec PECHON Madeleine Léonie. Avant la guerre, il travaillait comme cultivateur.
Georges doit être appelé pour servir dans la classe 1916 avec le matricule 588 de Montargis (1712 à Auxerre). Mais la guerre le rattrape et il est appelé à l’activité le 12 avril 1915 mais est réformé temporairement (1re catégorie) par la commission spéciale de Fontainebleau du 8 avril 1916 pour « bronchite persistante ». Le 10 juillet 1915, suite à une nouvelle commission il est maintenu réformé temporairement (1re catégorie). Classé service armé, inapte deux mois, par la commission de réforme d’Auxerre, séance du 12 mars 1917. Classé service auxiliaire, service de garde, par la commission de réforme de Fontainebleau du 20 juin 1917, pour « Emphysème et bronchite chronique, aucune amélioration au bout d’une inaptitude de deux mois ».
Dirigé sur le 138e Régiment d’Infanterie Territoriale le 12 septembre 1917. Puis le 23 dans la 9e Section d'Infirmier Militaire. Il sera donc au front vers le 23 septembre jusqu'à l'armistice. Ces sections ne disposent ni d'historique ni de journal de marches et d’opérations. D'après sa fiche matricule, il est aux armées et à l'intérieur comme suit :
|
Début de la période |
Fin de la période |
Intérieur Cdt Région[1] |
12/04/1915 |
21/08/1915 |
Armées Cdt Chef[2] |
22/08/1915 |
27/03/1916 |
Intérieur Cdt Région |
28/03/1916 |
07/04/1916 |
Intérieur Cdt Région |
12/05/1917 |
12/09/1917 |
Armées Cdt Chef |
13/09/1917 |
11/11/1918 |
Armées Cdt Chef |
12/11/1918 |
15/09/1919 |
[1] Au dépôt ou dans une affectation hors de la zone des armées. Sous les ordres du général commandant de région
[2] Sous les ordres du général commandant en chef (vers le front)
Pour aider à comprendre la différence, le schéma de la chaîne d'évacuation des blessés réalisé par CRDP de l’académie d’Amiens
Réforme définitive, proposé pour pension permanant 100% article 7. « Bacille pulmonaire en évolution active, infiltration bilatérale prédominante au sommet gauche, râle et craquement. Etat général passable. Commission de réforme d’Orléans du 20 décembre 1922. »
Georges est décédé le 31 janvier 1923 à Fleury. La maladie dont il souffrait était la tuberculose pulmonaire. Les symptômes sont les suivant : baisse de l’état général, asthénie (fatigue), amaigrissement, sueurs nocturnes, toux plus ou moins grasse associée à des crachats contenant quelque fois du sang, essoufflement même avec un effort minime, peut aller jusqu’à la détresse respiratoire… Il est enterré au cimetière de Fleury.
Il a reçu la mention "Mort pour la France" le 25 septembre 2018, suite à la demande de Lucie AUBERT.
Bien d'autres poilus sont morts des suites de la guerre, souvent des suites des gaz et de blessures. Ils ne sont malheureusement non morts pour la France et ne sont pas présent dans les livres d'or ou les monuments aux morts. Ne les oublions pas car ils ont donné leur vie pour la France et ont souvent beaucoup souffert.
Le 13/11/2017
Né le 11 avril 1892 à Cudot (89), fils de LEGER Eugène et BRIRA Célestine. Célibataire. Avant la guerre, il travaillait comme cultivateur.
A ses 20 ans, Paulin est appelé pour servir dans la classe 1912 avec le matricule 106 de Montargis (659 à Sens). Il intègre le 168e Régiment d’Infanterie le 10 octobre 1913 qui fait partie de la garnison de Toul (54). Il n’aura pas la joie de retourner à la vie civile car la guerre est déclarée pendant son service. Dès le 31 juillet, conformément au plan prévu, les compagnies sont réparties dans les forts du Nord-Ouest de la place. C’est là que le régiment passe le premier mois de la guerre, continuant l’exercice, exécutant aussi, aux abords du camp retranché, de nombreux travaux de défense. Au début du mois de septembre, les Allemands prenant comme objectif Nancy, exécutent de furieux assauts contre le Grand Couronné. Le Régiment participe à une série d'opérations, dont le but est de tenir la rive gauche de la Moselle, entre Frouard et Pont-à-Mousson et menacer ainsi la droite des assaillants du Grand Couronne. Le 5, un Régiment de marche est constitué avec des éléments de la garnison de Toul. Ce Régiment, commandé par le colonel LEBOCQ, comprend le 1er bataillon du 168e Régiment d'Infanterie, une partie du 2e et un bataillon du 169e Régiment d'Infanterie. Il est mis à la disposition de la 73e Division d’lnfanterie de réserve, qui résiste vers Martincourt. C'est le 6 septembre que le 168e reçoit le baptême du feu. Après avoir pris position devant Manonville et au Bois de la Rape, il est attaqué le soir du 6 et durant la matinée du 7, par des forces très supérieures. Les bataillons, soumis à un violent feu d'artillerie, lâchent un peu de terrain, mais se ressaisissent et, pendant deux jours, tiennent sur place, vers le Bois de la Côte-en Haye. Le Régiment de marche est relevé le 8 septembre. Le colonel BRAULT remplace à sa tête le colonel LEBOCQ, désigné pour le commandement de la 73e Division d’lnfanterie. Il est embarqué le 8 septembre à Liverdun et passe la nuit du 9 au 10 dans les casernes d'Essey, près de Nancy. C'est l'heure où les attaques allemandes, pour la Ville, se font de plus en plus pressantes. L'ennemi multiplie ses efforts. Il faut dégager Nancy, coûte que coûte. Le 10, le Régiment participe à la bataille qui obtiendra ce résultat. L'objectif du 168e, pour cette journée, c'est la lisière Est de la forêt de Champenoux. A midi, le 1er bataillon, suivi du 2e, s'élance du château du Tramblois, enlève le Bois de Velaines et chasse l'ennemi de la partie Nord-Ouest de la forêt. Avec de lourdes pertes, l'objectif est atteint. En fin de journée, le Régiment se rassemble alors dans le bois, vers la Maison Forestière. Le 11, l'attaque reprend. Il s'agit d'enlever, cette fois, le village même de Champenoux. Les Allemands, appuyés par une nombreuse artillerie, se défendent avec plus d'âpreté encore que la veille. Après plusieurs assauts, des alternatives d'avance et de recul, les bataillons s'accrochent aux lisières du village, mais ne peuvent progresser au-delà. Dans ces combats, le commandant BESSON est tué en se portant à l'attaque, en tête du 1er bataillon ; de nombreux gradés et hommes ont payé de leur vie cette première page de gloire, écrite par le Régiment. Le 15 septembre, le 168e regagne la région touloise et va cantonner, durant quelques jours, aux environs de Rosieres-en-Haye. A ce moment, le détachement dit de Saizerais est constitué avec deux bataillons de chacun des Régiments de forteresse de Toul : 167e, 168e, 169e, réunis en une Brigade et placés sous le commandement du colonel RIBERPRAY. Ce Groupement s’appellera bientôt Brigade mixte, puis Brigade active de Toul.
Dès sa formation, le détachement de Saizerais est engagé en Wœvre. Après leur échec devant Nancy, les Allemands veulent forcer les Hauts de Meuse et tournent Verdun par le Sud. Dans ce but, des forces importantes s'avancent entre Meuse et Moselle, vers Saint-Mihiel et Commercy. Les deux bataillons du 168e, que commande le chef de bataillon GOUTHAUD, entrent en ligne le 19 septembre, derrière le village de Mamey. Les 20 et 21, ils progressent. Après le combat, ils dépassent Mamey et s'installent aux lisières du Bois de la Lampe et sur la route de Limey à Pont-à-Mousson. Mais devant les contre-attaques répétées de l'ennemi et le repli général de la ligne française, ils abandonnent leurs conquêtes momentanées et s'arrêtent à leurs premières positions. Ils contribuent à y enrayer l'offensive ennemie. Le 25, l'attaque est reprise de notre part. La forêt de Puvenelle est enlevée, Mamey conquis de haute 'lutte. Les bataillons progressent au-delà et, le soir du' 26, leurs éléments de tête ont atteint les abords de l'Auberge Saint-Pierre. C'est là l'entrée du Bois-le-Prêtre. Le 27, les soldats du 168e pénètrent, pour la première fois, dans cette forêt et c'est le commencement d'une période dure, pendant laquelle le 168e, sous l'impulsion successive des colonels MAYRAN et ROLLET, et en collaboration étroite avec ses camarades de la Brigade mixte, acquerra un juste renom. Durant huit mois, du 27 septembre 1914 au 19 juin 1915, ce sera la lutte implacable, pied à pied, le combat de boyau à boyau, où chaque pouce de terrain est l'objet d'une sanglante rencontre. Les attaques se succèdent par bataillons, compagnies, sections, demi-sections. L'ennemi, qui sait l'importance de ce massif boisé dominant la Moselle et la Wœvre, résistera avec acharnement. Après avoir atteint, dans la journée du 26 septembre, l’Auberge Saint-Pierre, les deux bataillons du 168e continuent, les jours suivants, leur progression vers, le Nord. Ils s'enfoncent en coin dans la forêt du Bois-le-Prêtre. C'est une succession de combats acharnés qui se prolonge jusqu'au 5 octobre. A cette époque, le Régiment a dépassé la Fontaine-aux-Cerfs ; ses éléments de tête sont au contact des postes ennemis qui ont organisé, face au Sud, la tranchée de Fay. Le reste du mois d'octobre se passa en patrouilles, reconnaissances ; les bataillons creusent leurs premières tranchées. Au début du mois de novembre, les deux bataillons essaient de progresser vers la Fontaine du Père Hilarion. La résistance est dure. Après quatre jours de lutte, la tranchée de Fay est dépassée et la route de Fay-en-Haye-Pont-à-Mousson atteinte en plusieurs endroits. A l'issue de ces combats, l'heure où le Régiment va goûter quelques jours de repos. Vers le milieu du mois de décembre, le 2e bataillon exécute une attaque locale au Bois de Mortmare. Sa mission est d'enlever plusieurs tranchées importantes formant saillant à l'Est et à l'Ouest de la voie ferrée de Toul à Thiaucourt. Le bataillon entier part d'un bel élan, mais les mitrailleuses, non réduites, balaient le terrain. En quelques heures de combat, ses pertes sont immenses. Les objectifs atteints ne peuvent être maintenus qu’au prix de sanglants efforts. La 6e compagnie, que commande le capitaine EYRIES, lancée en pointe et prise de toutes parts sous le feu de l'ennemi, excite l'admiration de tous.
Le mois de janvier 1915 voit s'ouvrir une nouvelle série de combats au Bois-le-Prêtre. Les journées des 8 et 17 sont particulièrement pénibles. Ce sont les 1er et 3e bataillons qui attaquent. Ils s'emparent de plusieurs lignes de tranchées, de blockhaus et se maintiennent sur le terrain conquis, malgré de violentes contre-attaques. Le 16 février, le 2e bataillon attaque à la Croix-des-Carmes. L'ennemi s’accroche désespérément au terrain, ce n’est qu’au prix de longs efforts que les objectifs sont conquis. En avril, de nouvelles attaques ont lieu au Quart-en-Réserve. Tous les bataillons y participent. Les 6 et 7, plusieurs centaines de mètres sont enlevés au milieu de difficultés de toutes sortes. Au début du mois de mai, le Régiment entier exécute une action offensive Sur une ligne de blockhaus que l'ennemi tient encore au-delà de la Croix-des-Carmes. La lutte est acharnée. Des prisonniers, du matériel sont ramenés, mais au prix de lourdes pertes. Telles sont les principales actions auxquelles le 168e R. l. participe au Bois-le-Prêtre. Bien d'autres se sont déroulées : combats locaux, prises d'entonnoirs. Le Régiment, dans son séjour dans ce secteur, n'a livré qu'un seul et long combat, qui ne prit fin qu'avec la relève de la Brigade mixte. Les Allemands qui, durant ces huit mois de lutte, éprouvèrent cruellement le mordant et la ténacité de nos hommes, leur décernèrent, alors, dit-on, l'appellation désormais légendaire de loups : « Les Loups du Bois-le-Prêtre ». Le 18 juin 1915, la Brigade mixte est relevée toute entière.
Paulin arrive le 23 juin 1915 au 4e régiment de zouaves, 3e compagnie de mitrailleuses, qui se trouve sur le front d’Ypres (Belgique). Il est en train de réaliser des travaux d’organisation, des boyaux qui permettront d'aller en sécurité de Nieuport au Polder et au Mamelon-Vert. Le parapet si précaire du début n'est plus utilisé que comme parallèle de surveillance. Les parallèles principales et de doublement sont terminées au mois de juin ; les parallèles de soutien apparaissent fin juillet. Le redan de Nieuport est aménagé en place d'armes pour un bataillon. A l'arrière, les Zouaves ne sont pas moins actifs qu'à l'avant. Avec l'aide du Génie divisionnaire, ils transforment le camp de Mitry, le rendent habitable, construisent le camp Rinck, élèvent des écuries, installent des lavoirs, un théâtre complet a même surgi en un clin d'œil entre deux dunes. Partout, d'Oostduinkerke à Coxyde, ce coin de la côte belge montre des traces de leur activité. Au début d'août, le 8e Tirailleurs vient remplacer le 1er Zouaves qui quitte le groupement de Nieuport. Les Tirailleurs sont d'abord amalgamés aux hommes du 4e Zouaves, des sections mixtes sont formées. Au début de septembre, les Algériens étant suffisamment au courant du régime des tranchées, chaque régiment reprend son autonomie ; le 8e Tirailleurs garde le Polder et le Mamelon-Vert, le 4e Zouaves, passant à sa gauche vers la mer, occupe les Dunes et Nieuport-Bains. Le régiment trouve là un secteur dont l'organisation était déjà fort avancée ; les hommes goûtèrent surtout les abris enfoncés dans le flanc des mamelons de sable et qui leur paraissaient formidables, indestructibles auprès de leurs modestes cabanes de madriers et de sacs à terre de Lombardsijde. Désormais les torpilles pouvaient tomber, ils s'en moquaient et ils ne ménagèrent pas les louanges à l'adresse de leurs prédécesseurs du 1er, qui, eux, n'avaient pas ménagé leur peine et leurs efforts pour laisser use position digne de leur régiment. Cette période de Nieuport-Bains fut une période de travail intense ; chacun avait à cœur de parachever un travail si bien commencé et qui permettait de subir sans pertes les plus forts bombardements ; l'expérience devait le prouver par la suite. Nieuport-Bains fut organisé en point d'appui. Deux petits ouvrages, la Maison du Marin et Beacon le protégeaient dans la direction de l'ennemi. Deux grands boyaux couverts, éclairés à l'électricité furent construits de part et d'autre de la rue principale ; ils permettaient d'aller sans être vu de l'embranchement de la route Groenendijk jusqu'au canal de l'Yser, le boyau bordant la plage pouvait en plus être employé comme tranchée de tir. Toutes les caves des villas furent réunies par un boyau central reliant entre eux les différents abris et postes de commandement. Ces travaux n'exigèrent pas moins de quatre mois d'efforts soutenus ; tous les bataillons et l'équipe de pionniers y participèrent ; ils furent dirigés par le Commandant Lagarde et par son adjoint, le Capitaine Reynes. Le premier s'occupait plus spécialement des premières lignes et des défenses du canal de l'Yser ; le second, du travail à l'intérieur de Nieuport. Tous ces travaux, qui coûtaient tant de peine, permettaient de supporter avec des pertes réduites les bombardements de plus en plus violents des Allemands. Le secteur fut équipé pour répondre à ces bombardements ; des lance-bombes de 58, de 150 et de 240 furent amenés, montés dans les Dunes ; ils étaient servis moitié par des Zouaves et moitié par des artilleurs, qui rivalisaient d'entrain pour frapper et démolir les tranchées ennemies. Des journées entières se passaient dans le calme le plus absolu, puis brusquement, des tranchées adverses partaient les gros cylindres noirs lancés par des minens allemands. Pendant une heure, c'était un bombardement effroyable, indescriptible. Partout en l'air tourbillonnaient les torpilles et les bombes à ailettes. Puis brusquement tout rentrait dans le calme, chacun remontait son parapet éboulé, remettait ses abris en état, accumulait de nouvelles munitions, et quelques jours s'étant écoulés, un nouveau bombardement était déclenché, tantôt par les Français, tantôt par les Allemands. Les Zouaves appelaient ces journées agitées, des journées de « bamboula », et les grandes bamboulas dont on se souvient encore au régiment eurent lieu les 7 et 15 octobre, le 10 novembre, le 27 décembre, les 1er et 21 janvier 1916.
Le bombardement du 21 janvier fut effectué par le régiment. A peine était-il déclenché que les Allemands répondirent avec fureur et avec une violence inaccoutumée, si bien qu'il fut impossible aux bombardiers de tirer tous les projectiles prévus. La nuit fut calme cependant, mais le 22, dès l'aube, les Allemands commencèrent à battre les boyaux et points de passage avec des pièces de campagne. Le 23, l'artillerie allemande fut plus active encore. Il était de toute évidence qu'elle réglait son tir ; aussi personne ne fut très surpris quand le 24 à 10 h. 40 le « Trommerfeuer » se déclencha. Tout le monde s'y était préparé depuis deux jours. Il surprit cependant et par sa violence et par la proportion de gros projectiles qui s'abattaient sur les tranchées françaises. Jamais le régiment n'avait vu chose semblable et de fait, les pilonnages les plus forts de 304 et de Vaux-Chapitre qu'il eut à subir par la suite ne dépassèrent point en intensité ce bombardement précurseur des méthodes violentes que les Allemands allaient employer à Verdun. A 13 h. 30 il y eut un brusque arrêt, un silence impressionnant succéda au vacarme ; personne cependant ne se laissa prendre au piège et à part quelques guetteurs, tout le monde resta dans les abris. A 13 h. 40, le tir de l'artillerie allemande reprit, il était accompagné cette fois d'un tir de minens tel que nul ne se souvenait en avoir vu de semblable. Partout les torpilles tournoyaient, et la fumée était si épaisse que les hommes avaient la sensation d'être perdus, séparés irrémédiablement les uns des autres dans cet enfer où cependant il fallait rester. Les segments les plus battus étaient ceux de la Plage de la Grande Dune et du Polder, et c'est sur ceux-là que les Allemands, vers 16 h. 30, lancèrent leur attaque. Attaque bien timide à la vérité, car à part une dizaine d'hommes qui sortirent devant la Grande Dune et une quarantaine qui purent arriver jusqu'à la tranchée du Polder, personne ne bougea dans les tranchées allemandes ; notre tir de barrage clouait les assaillants sur place. Ceux du Polder furent facilement repoussés après une courte lutte, par une contre-attaque de la 15e compagnie. Le terrain laissé à la garde des Zouaves restait inviolé. Si les pertes du régiment furent sensibles, celles des Allemands furent plus sérieuses encore. Ils auront ce jour-là, plus de 900 hommes hors de combat. Les tranchées françaises étaient complètement pulvérisées, les boyaux n'existaient plus, il fallut les refaire, remonter les parapets, replacer les défenses accessoires. Les Allemands qui avaient à panser des blessures autrement sérieuses, laissèrent travailler le régiment en toute liberté. A la fin de février fut commencée la construction d'un nouveau camp à proximité de Coxyde-Bains ; il fut appelé le camp Bador, pour honorer la mémoire d'un Zouave du 11e Bataillon tombé glorieusement dans les journées précédentes. Le nouveau camp fut construit avec le plus de confort possible, les baraques de la troupe comprenaient à une extrémité une salle de lecture, à l'autre extrémité une chambre pour les sergents. Au milieu du camp une salle de spectacle, décorée et ornée par les Zouaves, pouvait contenir plus de 800 personnes. La troupe théâtrale du régiment y donna de nombreuses représentations. Cette troupe était connue de toute la garnison de Coxyde. Ses musiciens et ses chanteurs donnaient tous les après-midi un concert au mess des officiers. Les comédiens montèrent et jouèrent une revue qui eut le plus franc succès et qui, avec d'autres pièces, tristes ou gaies, aidèrent tout le monde à passer les longs mois d'hiver sans trop subir les atteintes du « cafard ». Le 15 mars, le calme qui de nouveau était revenu dans le secteur fut troublé par un coup de main de notre part. Quarante grenadiers, sous la conduite des Sous-Lieutenants Beaudoin et De Ghost, réussirent à pénétrer avec une rare témérité jusqu'à la troisième tranchée allemande qui fut trouvée évacuée. En avril, un second coup de main exécuté par le Sous-Lieutenant Papillon eut le même résultat. Ces actions continuelles, ces bombardements incessants exerçaient lentement leur influence sur le régiment, le confirmaient presque à son insu dans sa propre valeur. Comme un outil que l'on forge, il avait été façonné aux rouges lueurs des obus, dans le fracas des torpilles, au froissement des baïonnettes, au sifflement des balles. Le 20 avril, le régiment quitte la Belgique, les Dunes, Nieuport-Bains ! et après un alerte défilé au milieu de toute la population de Coxyde, accourue pour lui dire adieu, est embarqué dans des camions autos à destination de Dunkerque et de sa banlieue. Du 20 avril au 10 mai, dans les Dunes de Dunkerque (59), le régiment s'exerce au combat offensif ; des écoles de Commandants de Compagnie, de Chefs de section, de grenadiers, de mitrailleurs, sont créées et les cours en sont suivis avec fruit par tous les officiers, sous-officiers et Zouaves. Le 10 mai, le régiment quitte Dunkerque par voie ferrée et débarque le 11 à Breteuil (60), dans l'Oise, à proximité du camp d'instruction de Crèvecœur-le-Grand. L'instruction des troupes et des cadres est reprise avec activité. Le 4e Zouaves prend part à plusieurs manœuvres de Brigade et de Division. En dépit de la bataille de Verdun (55) qui fait rage et qui absorbe une partie de nos forces, le Haut Commandement Français prépare une grande offensive dans le Nord et la 38e Division doit y participer. Cependant les attaques allemandes qui redoublent de violence feront que ce ne sera pas vers les rives de la Somme mais vers celles de la Meuse que le régiment va être dirigé. Vers le 20 mai, il lance des attaques très violentes sur la rive gauche de la Meuse, sur les deux bastions de la défense française, le Mort-Homme et la Cote 304. Repoussé, il rameute de nouveau ses forces, il va recommencer ; l'heure du 4e Zouaves sonne, l'ordre attendu depuis si longtemps arrive. Le 26 le régiment est transporté en chemin de fer à Revigny ou il débarque le 27, cantonne à Rancourt le 28 et par Jubécourt gagne le bois de Saint-Pierre, en arrière de Montzéville. Le 30 le régiment quitte les bois pour relever sur la cote 304 le 173e de Ligne. Voici les Zouaves sur la colline sans nom, au milieu des morts, séparés par un cercle de feu du reste du monde. A la nuit tombante, ils ont quitté les bois qui les abritaient et où d'autres déjà les remplacent ; à leur tour, ils ont suivi la grande voie douloureuse qui conduit à la terrible colline. Dans la nuit noire, trouvant leur route à la lueur des coups de tonnerre, baissant la tête sous les rafales, courant devant les obus, trébuchant dans les trous, après avoir traversé Montzéville et Esnes que les 210 achèvent de détruire, ils sont arrivés en première ligne. Les tranchées et les boyaux ont disparu sous l'incessant marmitage, il faut se contenter des trous d'obus pour s'abriter. La terre a cet aspect lunaire, cet aspect de fourmilière croulante qu'on ne voit qu'à Verdun. Pas un arbre, pas un brin d'herbe pour montrer qu'autrefois il y a eu là des bois et des prairies. Rien ne repose la vue, partout la glèbe éventrée montre ses blessures, chaque trou n'est que la marque du dernier obus tombé là. Partout des fusils broyés, des brancards brisés, des sacs éventrés, des pelles, des pioches, des casques attestent avec quelle furie on s'est battu sur ce tertre. Les morts servent de points de repère. Dans les trous d'obus, sur les parapets, ils dégagent une odeur immonde que n'arrive pas à faire disparaître l'âcre odeur de la poudre. En avant, en arrière, à droite, à gauche, partout dans les vallées et les replis de terrain, les canons aboient, hurlent, tonnent implacables. A la tombée de la nuit, le spectacle devient effrayant. De tous les points de l'horizon, perçant la brume qui monte, les lueurs de la lourde et les éclairs des 75 deviennent plus nombreux, plus rapides. L'artillerie allemande répond, les obus qui se croisent forment une voûte d'acier au-dessus des têtes. Les fusées rouges, vertes, oranges s'envolent mauvaises, semblant crier ; Barrage ! Barrage ! Tue ! Tue et déchaînant une véritable folie. A leur appel, des batteries ignorées s'allument à leur tour, crachant la mort ; les torpilles paresseuses montent dans le ciel et retombent par volée, défonçant, écrasant tout. Des tonnes d'acier s'abattent sur 304, le sommet que creusent et fouillent les obus fume comme un volcan. De minute en minute, le marmitage devient plus intense, plus violent. Les vallées et les ravins s'emplissent de fracas et de fumée, le cercle de feu qui étreint la sinistre colline s'étend, se resserre, va l'engloutir, la broyer. Tout tremble, tout saute, tout croule. Est-on sur terre ou est-ce l'au-delà ? Et cependant des hommes sont debout dans cet enfer. Ils exposent, inébranlables, le mur vivant de leurs poitrines aux trombes d'acier allemandes. On leur a simplement demandé de tenir, ils tiennent ! Et comme si ce n'était pas assez de misères, la pluie s'ajoute encore aux souffrances des Zouaves. Partout elle ruisselle, collant les vêtements aux corps, rendant plus lourdes encore les lourdes capotes des soldats. Les parapets s'effondrent, il faut se battre avec la boue, dans laquelle on enfonce jusqu'à mi-jambe, et comme on ne peut s'étendre il faut se résigner à ne jamais dormir. Sous l'action de l'humidité, les pieds enflent, deviennent douloureux ; marcher est un supplice. Il faut creuser cependant, remonter les parapets qui s'éboulent, transporter les munitions, évacuer les blessés, et toutes les nuits aller jusqu'à Montzéville, escorté par les obus, chercher la soupe. Elle arrive le lendemain, quand elle arrive ! froide, souillée de terre, immangeable, mais quoi, l'on sait s'en contenter, et comme la boisson n'est pas suffisante on se contente aussi du liquide fangeux recueilli dans les trous d'obus où traînent des détritus innommables. Aussi la dysenterie, dès le troisième jour, fait son apparition, et ce seront des fantômes hâves, décharnés, les lèvres noires, les yeux brillants de fièvre qui descendront de 304. Du 31 mai au 5 juin, les 2e et 3e bataillons sont seuls en première ligne, le 3e occupe le sommet et la pente Est de la colline, face au Mort-Homme ; le 2e est plus à droite, dans le ravin de la Hayette. Dès le 1er au soir, se produit une alerte qui déclenche de part et d'autre un violent tir de barrage. Le 5, le 4e bataillon vient se placer en réserve dans les tranchées Miramas et Tarascon. Un gros accident, survenu le 3 dans le bois de Béthelainville, le prive de tous ses commandants de Compagnie. Ce jour-là, vers 10 heures, au cours d'une réunion, un obus de gros calibre tombe à proximité du groupe des officiers. Le Capitaine Moreau, le Lieutenant Robert, 3 Caporaux et un Zouave sont tués sur le coup. Les Capitaines Claerbout, les Lieutenants Dupuis, Delivet, Bourdillat, Bourdillon sont blessés ainsi que 16 gradés et Zouaves. En dépit de ces pertes, les compagnies commandées par des Sous-Lieutenants étaient loin d'être démoralisées, elles surent le prouver par la suite. Les journées du 5 au 9 se passent sans attaque d'infanterie et les communiqués sans doute n'enregistrent pour ces jours-là que la phrase laconique : « Sur la rive gauche de la Meuse, actions d'artillerie ». Mais ceux qui n'ont pas vu ! ceux qui n'ont jamais été de la mitraille ne peuvent s'imaginer ce qui, à Verdun, s'appelait actions réciproques d'artillerie. Tous les jours la liste des morts et des blessés s'allonge, les camarades disparaissent un à un et sans attaque, les Compagnies sont déjà réduites de moitié. Le 9, vers 10 heures, le bombardement allemand, qui n'arrête jamais, devient plus violent. A 11 heures, il atteint toute son intensité, c'est un véritable feu roulant que scandent les éclatements déchirants des torpilles et des 280. Le tir de l'artillerie allemande est surtout concentré sur le bois Camard, le sommet de la cote 304 et la tranchée du Bec. Le 3e bataillon subit des pertes sérieuses, il a de nombreux tués et le feu est tel qu'on ne peut songer à évacuer les blessés. Le Sous-Lieutenant Adant, de la 12e compagnie, qui a une conduite admirable depuis le début du bombardement et ne cesse de circuler dans la tranchée où se trouve sa section, réconfortant les uns, riant avec les autres, soutenant tout le monde par son courage et son moral extraordinaire, est tué par une torpille qui ensevelit le Sergent Nondedeu et trois Zouaves de sa section. Vers 15 heures, un obus de 280 arrache le bras gauche du Lieutenant Guerrieri, commandant la 11e compagnie, et qui était connu de tout le régiment pour sa bravoure et son étonnante audace. Le Sous-Lieutenant Durand se porte à son secours, le ramasse dans la boue, panse l'horrible blessure. Guerrieri, les dents serrées, ne songe pas à son mal, il se sait perdu pourtant. Toute sa pensée est à sa Compagnie, à ses hommes qu'il aime tant ; tiendront-ils, tout-à-l ’heure, sans leur Chef, quand l'attaque allemande se produira ? Si la 11e reculait il crie à ses soldats sa dernière recommandation : « A Mes amis, faites toujours comme si j'étais parmi vous ! » Ce sont ses derniers mots, un nouvel obus lui ouvre le crâne et tue à ses côtés le Sous-Lieutenant Durand. Il n'a pas parlé en vain, sa prière est sur toutes les bouches et tout à l'heure, devant les calots gris, les Zouaves de la 11e montreront qu'ils l'ont comprise. Voilà six heures que dure ce bombardement infernal. Six heures qu'on compte par lambeaux de minutes, la gorge sèche, les yeux brûlés par la fièvre. Qu'ils sortent, qu'ils attaquent, que l'on se batte enfin, mais que finisse ce cauchemar ! 16 h. 30 ! Enfin ! le cri d'alerte des guetteurs jette tout le monde au parapet, les Allemands arrivent, précédés de lance-flammes, ils ne sont plus qu'à 50 mètres de la ligne : Trop tard ! jamais ils ne l'atteindront ! Debout sur la tranchée pour mieux viser, hurlant la Marseillaise, les hommes de la 9e compagnie, leur Capitaine en tête, abattent les deux premiers « Flamen ». Les mitrailleuses se mettent de la partie, les Allemands tombent de tous côtés ou refluent vers leurs lignes ; ceux qui se sont couchés dans les trous d'obus resteront jusqu'au soir sous la menace des fusils. Ce beau succès était chèrement acheté ; les pertes du 3e bataillon étaient sévères. Les journées suivantes sont plus calmes, seul le bombardement du Ravin de la Hayette et du ravin en arrière de 304, connu sous le nom de Ravin de la Mort, continue, rendant très pénibles et très dangereuses les corvées de ravitaillement et les évacuations de blessés. Il ne se passe pas de jour sans qu'un nouveau cadavre ne s'ajoute à tous ceux qui bordent la piste suivie par les Zouaves. Dans la nuit du 9 au 10 juin, le 11e bataillon est relevé, le 3e quitte les tranchées la nuit suivante, remplacé par le 5e. Le 15, le 4e bataillon, bien que très fatigué par 10 jours de ligne, reçoit l'ordre d'attaquer la tranchée Vailly, pour aider la progression des troupes qui avancent sur les pentes Ouest du Mort-Homme. La 14e compagnie est désignée pour exécuter cette attaque, mais l'opération, préparée en hâte, décommandée, puis reprise, ne réussit pas. A peine sortis des tranchées, les Zouaves sont accueillis par un feu de mitrailleuses et ne peuvent progresser. Le 16 au matin, nouvelle tentative pour s'emparer de la tranchée Vailly ; les grenadiers réussissent, en se glissant de trous d'obus en trous d'obus, à parvenir jusqu'à 20 mètres de la tranchée allemande, mais ne peuvent traverser le barrage ennemi. Ils sont obligés de revenir à leurs positions de départ. Le 16, le régiment laissant le 5e bataillon en ligne, gagne par étapes le village de Fleury-sur-Aire en vue d'une refonte complète des bataillons. Le 11e bataillon est dissous et ses unités réparties entre les trois autres. Ainsi recomplétés, et après quelques jours de repos, les trois bataillons du régiment sont de nouveau mis en ligne sur la cote 304 et occupent sensiblement le même secteur que lors de leur premier séjour. Mais les conditions sont changées, le bombardement est moins violent et par suite les pertes sont moins lourdes. Seule la pluie continue à tomber avec la même régularité et comme la première fois rend très pénible le séjour dans les tranchées transformées en véritables bourbiers. Le ravitaillement est toujours difficile et de nouveau, l'humidité aidant, de nombreux cas de dysenterie apparaissent, qui réduisent les effectifs. Du 26 juin au 1er juillet, les 3e et 4e bataillons occupent les positions de soutien en avant du village d'Esnes et dans le ravin de la Hayette. Le 1er juillet, vers 3 h. 30 du matin, les allemands déclenchent subitement un violent bombardement sur le sommet de 304 tenu par le 120e Régiment d’Infanterie. A 5 heures, le 3e bataillon est alerté et reçoit l'ordre de porter d'extrême urgence deux compagnies vers le réduit Odent et le boyau 304, afin de contre-attaquer et de reprendre les éléments de tranchée tombés aux mains des Allemands. Les 11e (compagnie Lassouquère) et 9e compagnies (compagnie d'Hubert) partent à 5 h. 30, descendent dans le Ravin de la Mort sans pertes, mais sur les pentes Sud de 304 la 9e est prise dans un violent tir de barrage. Les pertes sont nombreuses et la progression de cette Compagnie, déjà fort pénible par suite de l'état du terrain, est considérablement ralentie. Avec un esprit de décision remarquable, le Capitaine Lassouquère, commandant le 11e, lance son monde sur la tranchée occupée, sans attendre l'appui de la 9e. Les Allemands, surpris par la rapidité de cette contre-attaque qui vaudra à la 11e une citation à l'Ordre de l'Armée, ne tiennent pas devant la fougue des Zouaves. Au bout de quelques minutes de combat ils lâchent pied et les hommes de la Compagnie réoccupent sans difficultés les tranchées un instant perdues. La 9e vient alors renforcer la ligne tenue par la 11e. Les pertes de la Compagnie Lassouquère sont faibles, celles de la Compagnie d'Hubert sont assez élevées. Le Capitaine et le Sous-Lieutenant Glatigny sont grièvement blessés. Le Sergent Pétrus, qui tant de fois avait fait rire ses camarades dans les représentations théâtrales du régiment, est tué. Le 12 juillet les derniers éléments du régiment quittaient la cote 304. Du 13 juillet au 4 août, le régiment se repose de ses fatigues dans les agréables villages des environs de Revigny ; les permissionnaires vont raconter au pays leurs exploits de Verdun. Les nouveaux renforts, aux récits de l'attaque du 9 juin, ou de la contre-attaque du 1er juillet, ont bientôt un moral à l'égal des anciens. Les jeux, les séances sportives et récréatives, les exercices, les concours de tir au fusil et à la mitrailleuse sont repris et maintiennent tout le monde dans ce bon moral. Le 4 août au soir, les Zouaves sont devant Souville. Le 4e et le 3e bataillons sont en ligne. Le 40 à gauche, relié vers Fleury-devant-Douaumont au 8e Tirailleurs ; le 3e à droite sur les pentes Est du Ravin des Fontaines. Le 5e bataillon, en soutien, occupe les tranchées du fort et les tourelles. La relève, en dépit d'un violent marmitage, a lieu sans pertes et sans incidents. Le 5, à la pointe du jour, les Allemands déclenchent un très violent bombardement par obus de tous calibres sur tout le front du régiment. La première ligne, le Ravin des Fontaines, et sa carrière où se trouve le poste de commandement du Colonel sont particulièrement battus, tandis que Souville est soumis à un tir de démolition par obus de 305 et de 380. Les fils téléphoniques sont bientôt coupés, les Zouaves étant presque entourés par les Allemands ne peuvent envoyer de coureurs vers l'arrière. Ils ne devront compter que sur eux-mêmes pour tenir devant l'attaque allemande qui se prépare ; mais depuis longtemps les Zouaves savent comment se repoussent les attaques. A 7 h. 40, l'ennemi sort de ses tranchées, il avance sur quatre vagues. A gauche, profitant d'un vide au centre du 4e bataillon, les grenadiers bousculent nos petits postes, traversent notre première ligne et réussissent même à dé passer le poste de commandement du chef de bataillon. Les compagnies résistent sur tout le front. Les sections de soutien, la liaison du bataillon, les signaleurs et les pionniers, sous le commandement du Sergent-Major Domazon, contre-attaquent vigoureusement et repoussent les vagues d'assaut allemandes. Après 45 minutes de combat, l'ennemi est refoulé jusque dans ses tranchées. Le Capitaine Ageron, commandant la 14e compagnie, quoique blessé par trois éclats d'obus, continue à combattre et, à la tête de ses hommes, réoccupe bientôt tout le terrain qu'il a dû un instant abandonner sous la pression ennemie. Le Capitaine de Clermont-Tonnerre, nouvellement arrivé au régiment, tient tête à l'attaque avec la 13e. Le Sous-Lieutenant Pailler, commandant la 15e, est tué à la tête de sa section de soutien au moment où, debout sur la tranchée, il s'apprête à poursuivre l'assaillant. Partout, officiers et Zouaves rivalisent d'ardeur, de courage, d'abnégation pour que cette nouvelle attaque ait le sort de toutes celles qu'ils ont subies. A droite, le 3e bataillon repousse assez facilement l'assaillant sur la plus grande partie de son front. Dans le Ravin des Fontaines, la 19e compagnie et les deux sections de la M/5 qui, au cours de la nuit, se sont placées en crochet défensif vers la droite du 3e et qui ont eu des pertes excessivement lourdes par suite du bombardement subissent à leur tour l'attaque ennemie ; leurs hommes ne reculent pas cependant, au contraire, ils se lancent avec fureur sur le bataillon allemand qui, déjà, croyait tenir le fort. Une lutte sauvage, rapide, s'engage aussitôt. Dans ce terrain bouleversé, l'alignement et l'ordre des sections ne peuvent être maintenus, les Zouaves et les Allemands, mélangés, confondus en une masse tourbillonnante se fusillent à bout portant. Les obus des deux artilleries tombent au milieu des deux troupes et y creusent encore, plus que les balles, des vides profonds. Les trois officiers de la 19e compagnie sont tués. Le Sous-Lieutenant Bonnefoy, commandant les deux sections de mitrailleuses sert lui-même une de ses pièces ; entouré d'Allemands, ses hommes tués ou blessés autour de lui, il va succomber à son tour ; pour s'en tirer, il doit ruser, contrefaire le mort et attendre au milieu des cadavres qu'une contre-attaque de notre part vienne le délivrer. Elle va bientôt se produire. La 17e compagnie, en réserve sur les pentes de Souville, reçoit l'ordre de se porter en hâte à la droite du 3e bataillon, de faire front et d'arrêter coûte que coûte les Allemands qui, de trous d'obus en trous d'obus, progressent dans le fond du ravin. Avec une abnégation, un esprit de sacrifice, une discipline qu'on n'admirera jamais trop, les braves de la 17e descendent les pentes de Souville au milieu d'un barrage d'obus de tous calibres et d'une fusillade intense. Les mitrailleuses allemandes du Bois Fumin et celles en arrière de la Chapelle Sainte-Fine tirent avec furie. A chaque instant un homme tombe mortellement frappé ; on peut suivre la malheureuse compagnie à la longue trace de « kakis » qu'elle laisse derrière elle. Elle a fait deux cents mètres à peine que déjà elle n'existe plus, ses rares survivants se jettent dans des trous d'obus et attendent que la tourmente de feu et d'acier passe. Le soir, au nombre de 19, ils rejoindront leur bataillon. La situation est critique. Chaque minute qui passe l'aggrave encore ; les Allemands ayant complètement tourné le 3e bataillon sont à deux cents mètres à peine du poste de commandement du Colonel ; encore quelques instants et rien ne les empêchera plus d'aller jusqu'à Souville. L'impossible se réalise. Promptement le Lieutenant Charles réunit les quelques pionniers qui lui restent, et avec des cyclistes, les téléphonistes, 17 hommes en tout, se porte au-devant des Allemands qui croient ne plus avoir de Français devant eux. La petite troupe peut masquer son mouvement grâce à un pli de terrain. Arrivée à 30 mètres des Allemands, les 17 Zouaves se relèvent, sautent sur les grenadiers ennemis surpris ; une quinzaine de ceux-ci se rendent aussitôt tandis que leurs camarades refluent précipitamment vers leurs lignes. La courageuse petite troupe profite de cette panique de l'ennemi pour avancer encore, délivrer le Sous-Lieutenant Bonnefoy et les quelques survivants de la 19e restés sur le terrain. Jusqu'au soir elle tiendra les Allemands en respect et ceux-ci, la nuit venue, retourneront à leurs tranchées de départ, abandonnant à tout jamais l'idée de prendre Souville.
Paulin est mort le 5 août 1916 à Vaux durant cette terrible attaque qui coûte la vie à 107 hommes, fait 411 blessés et 94 disparus. Sa sépulture reste inconnue mais son corps n'a peut-être jamais été retrouvé ou est dans un ossuaire du secteur.
Il est cité à l’ordre du régiment n°66 : « Zouave courageux et animé d’un excellent esprit. Parti en campagne au début a été blessé. Revenu au front le 5 octobre 1915 s’est toujours bravement comporté, notamment dans la journée du 7 juin 1916 en secourant deux de ses camarades grièvement blessés dans leurs abris de 1re ligne sous un violent bombardement ».
Citation pour la médaille militaire publiée au journal officiel du 27 février 1928 : « brave soldat. Mort glorieusement pour la France le 5 août 1916 à Vaux-Chapitre (Meuse). Croix de guerre avec étoile d’argent »
Le 13/11/2017
Né sous le nom DEMAMPS le 20 février 1890 à Chassy (89), fils de DEMAMPS Denise Hélène et reconnu par SALMON Emile. Célibataire. Avant la guerre, il travaillait comme charcutier.
A ses 20 ans, Marcel est appelé pour servir dans la classe 1910 avec le matricule 44 de Montargis (1316 à Auxerre). Il intègre le 155e Régiment d’Infanterie le 9 octobre 1911. Son service se termine le 7 janvier 1914 et il obtient son certificat de bonne conduite.
Marcel arrive le 3 août 1914 au 155e Régiment d’Infanterie c'est à partir du 14 août seulement que le 155e entame la marche vers le Nord, à travers la Woëvre, qui devait l'amener sur son premier champ de bataille, le 22 août 1914, à Joppécourt-Bazailles (54), au Sud de Longwy. Parti de grand matin de la région Affléville-Bouligny, le régiment, suivant le 154e, marche sur Joppécourt, où il s'arrête momentanément, tandis que le 154e est engagé dans un combat violent et meurtrier à Fillières. A la fin de la matinée, le 3e bataillon est engagé entre Joppécourt et la Crusnes pour recueillir le 154e. Dans l'après-midi les 1er et 2e bataillon reçoivent l'ordre de franchir la Crusnes au Sud de Ville-au-Montois, de se déployer face à, l'est et d'attaquer sur Fillières. Le 3e bataillon, à la fin de l'après-midi, se trouve engagé dans l'action sanglante que la 80e Brigade et le 26e Bataillon de Chasseurs à Pied continuent contre une division du XVIe Corps allemand qui attaque la 40e Division d’Infanterie dans son flanc droit. Il se conduit héroïquement au prix de pertes sanglantes, son commandant, le chef de bataillon DETRÉ, est blessé d'une balle dans le ventre. Le 1er et le 2e bataillon, après avoir franchi avec de grandes difficultés le marais de la Crusnes, entament leur action offensive. L'ordre de repli leur parvient à, ce moment-là, il n'était que temps, car ils étaient complètement débordés sur leur gauche, les deux bataillons s'échappent dans le plus grand ordre par la tranchée du chemin de fer. Le commandant REBOUL rejoint avec trois compagnies de son bataillon le colonel dans la région d'Étain, le 2e bataillon et une compagnie du 1er sont aiguillés sur Nouillonpont (55) par le général HACHE, commandant la 40e Division d’Infanterie. Ce premier choc a été dur pour le régiment. Dès l'après-midi du 23, le régiment s'est ressoudé à, Billy-sous-Mangiennes ; le 24, il est en réserve de corps d’armée ; le soir, le 1er et le 2e bataillon prennent position en avant de la 12e Division d’Infanterie, de part et d'autre de la ferme de Constantine, et livrent toute la nuit un combat violent et victorieux aux Allemands. Au petit jour, ceux-ci amènent des canons-mitrailleuses, et c'est sous un feu violent mais peu efficace que les deux bataillons, devenus arrière-garde de la 12e Division d’Infanterie, exécutent le repli qui leur est prescrit. A partir du 26 août, le 6e Corps est sur la rive gauche de la Meuse, le 155e est à Marre, puis à Malancourt qu'il quitte le 30 août ; le 1er septembre, il bivouaque près de Gesnes. Au cours de ces longues marches, le régiment reste admirable, les troupiers qui ignorent tout de la situation générale demandent sans cesse à leurs officiers les raisons qui font céder du terrain sans combat. Aussi est-ce avec joie que, le 2 septembre au matin, la 40e Division d’Infanterie, qui se trouve au Sud de Cierges, reçoit Tordre de faire front. Les Allemands attaquent sans succès. Dans l'après-midi une contre-attaque française furieuse à laquelle participent les 1er et 3e bataillons du 155e enlève Cierges et le mamelon Est. Les Allemands se replient en désordre en abandonnant morts, blessés et prisonniers. Ce fut une belle journée. Le 6e Corps ayant montré aux Allemands qu'il existait encore, continue le lendemain en doublant l'étape sa marche vers le Sud. Le 5 septembre, il est à Courcelles-sur-Aire où allait commencer pour lui la bataille de la Marne. Le 6 septembre, les 1er et 2e bataillon attaquent sur la rive droite de l'Aire au Sud de Bulainville ; le 7 septembre, le 2e bataillon est jeté dans le bois Chanel, où il restera pendant la nuit sanglante du 10 septembre. Dans la nuit du 9 au 10 les Allemands veulent en finir avec cette obstinée IIIe armée. C'est une attaque générale menée par plusieurs corps d'armée ; sous un violent orage on se bat corps à corps ; les unités du 155e mêlées et confondues, toute la nuit perdent, reprennent, perdent à, nouveau le plateau de l'arbre de Courcelles. A Taube, l'armée du Kronprinz trouve encore en face d'elle, à l'Est de Courcelles, le 6e Corps pantelant et sanglant, mais toujours vigoureux et résolu. Le 11 septembre, l'ennemi battait en retraite, la bataille de la Marne était gagnée, la France sauvée. La poursuite amène le régiment au nord de Verdun. Mais il en est ramené brusquement en arrière sur Lacroix-sur-Meuse ; le 23, il s'organise devant Lacroix. Le 24 et le 25 il est engagé dans un combat furieux, mais l'Allemand est arrêté net.
Marcel part en détachement le 25 août 1914 mais la fiche matricule n’indique pas où. Il se retrouve à l’hôpital de Vierzon le 14 septembre et revient le 2 octobre aux armées. Pour ne pas perdre d’élément de son parcours voici la continuité de la vie au 155e Régiment d’Infanterie.
Le régiment s'installe défensivement dans le bois des Chevaliers : la rase campagne est finie. Du 4 octobre au 15 décembre, le régiment occupe le bois des Chevaliers qu'il organise défensivement. Puis il est relevé le 16 décembre et reste au repos à Osches, puis à Issoncourt jusqu'au 9 janvier 1915.
Il se dirige alors vers l'Argonne, où il est en secteur à, partir du 15 janvier. L'Argonne est une région boisée au sol argileux qui se transforme, lorsqu'il pleut, en boue liquide, que les puisards, quelque profondeur qu'ils soient, ne suffisent pas à, faire disparaître. C'est le théâtre d'une lutte d'une âpre violence ; les attaques continuelles d'infanterie, les bombardements ininterrompus des arrières par obus et des premières lignes par engins de tranchées, rendent le séjour dans ce secteur excessivement pénible. La 79e Brigade tient le secteur du bois de la Gruerie au Nord de Vienne-le-Château (51) avec un régiment tout entier en ligne, un autre en réserve, qui se relèvent tous les trois jours. Le régiment relève en première ligne dans la nuit du 17 au 18 janvier. Le 19, la 11e compagnie est attaquée mais parvient, après deux contre-attaques, à reprendre le terrain perdu. Le 155e est à nouveau en ligne le 27 ; le 29 janvier 1915, les Allemands font sauter à 6h 30 les tranchées de part et d'autre d'un saillant tenu par le 3e bataillon et, pénétrant par ces brèches, parviennent à le cerner. Ce bataillon se défend jusqu'à midi. Des contre-attaques (154e, 2e Colonial, 161e R. I. ) enraient l'avance ennemie. Le régiment aura perdu dans cette journée environ l'effectif d'un bataillon. Les relèves continuent entre le 154e et le 155e régulièrement, de la première ligne à la zone de demi-repos (Vienne-le-Château, Moiremont); les bombardements par obus et engins de tranchées vont s'intensifiant ainsi que les coups de main sur les petits postes, particulièrement sur le poste dit des Bouleaux que la 3e compagnie avait réussi à enlever par surprise le 29 mars. La guerre de mines s'accentue devant le 3e bataillon. Le 13 juin, le 155e est relevé par le 112e R. I. et reste au repos à Moiremont jusqu'au 20 juin. Les Allemands attaquent très violemment le 15e corps, le régiment est alerté le 20 juin et du 20 au 27 (1er et 2e bataillon) contre-attaque et obtient quelques succès partiels. Le 29 juin, le 1er bataillon monte en ligne vers Bagatelle. Le 30 juin, l'ennemi déclenche un violent bombardement et attaque à 8 heures. Le 1er bataillon, réduit à deux sections, doit se replier. Les deux autres bataillons attaquent avec le plus grand esprit de sacrifice. Les jours suivants, c'est une série d'attaques et de contre-attaques incessantes. Le 4 juillet, le régiment est relevé et reste au repos à, La Neuville-aux-Bois et Rémicourt jusqu'au 13 juillet. Le 13 juillet, il est ramené à Vienne-la-Ville. Le 14 juillet une division coloniale attaque le long de la route de Binarville. Les 2e et 3e bataillon sont peu à peu engagés avec elle jusqu'au 17 juillet. Le 18 juillet, le 1er bataillon prend les lignes à Saint-Hubert (La Harazée) et, le 23, les 2e et 3e bataillon montent en ligne à Marie-Thérèse. Les relèves s'organisent avec le 154e dans ce secteur qui est le théâtre d'une lutte perpétuelle d'engins de tranchées et de grenades. Le 1er août, le 155e est en ligne et subit un bombardement intense toute la matinée. A 12h 30, les Allemands attaquent sur Marie-Thérèse avec des liquides enflammés et nous forcent à nous replier, pied à pied, par les boyaux, nos contre-attaques arrêtent l'avance allemande. Le 11 août, le régiment est relevé en entier et vient au repos à Aulnay-sur-Marne. 1er au 24 septembre bivouaque dans le secteur de Saint-Hilaire-le-Grand où il fait des travaux d'approche. Le 25 septembre 1915, l'attaque prévue se déclenche, la première ligne allemande est enlevée et malgré des résistances locales la progression continue vers la deuxième position. Le soir, le régiment se regroupe, il a pris deux canons de campagne au bois 12, 400 prisonniers, dont 2 officiers.
Le 27, l’ordre est donné d’attaquer la parallèle de l’Epine de Vedegrange. A droite un bataillon du 154e puis de droite à gauche : 3e bataillon du 155e, 2e bataillon du 155e, 1er bataillon du 155e. Dès 3h les soldats sont placés et la préparation d’artillerie commence à 6h. Ce n’est qu’à 9h15 que les éléments se portent en avant, les pertes sont assez sensibles dû aux tirs de mitrailleuses allemandes.
Marcel est évacué le 27 septembre 1915 à l’hôpital de Châlons-sur-Marne pour une fracture du crâne, dans la région temporale, causé par un obus mais décède dans la journée. Il repose au cimetière de La-Celle-Saint-Cyr.
Citation pour la médaille militaire publiée au journal officiel du 18 octobre 1921 : « Soldat courageux et dévoué. Mort pour la France des suites de blessures reçues, le 14 septembre 1915, à Saint-Hilaire-le-Grand, dans l’accomplissement de son devoir. Croix de guerre avec étoile de bronze ».
En février 1916, un secours de 150 francs est accordé à son père. A titre de comparaison, un obus de 120, en mai 1917 coûte 120 francs et équivaut à 30 861 € d’aujourd’hui.
La tombe va être reprise par la mairie afin de faire un carré militaire
Le 01/11/2017
Né le 2 février 1889 à Fleury-la-Vallée, fils de MARY Emile et ESNAULT Angèle. Marié le 10 avril 1909 à Paris 13e avec RICHARD Marie. Avant la guerre, il travaillait comme lisseur.
A ses 20 ans, René est appelé pour servir dans la classe 1909 avec le matricule 1825 du 3e Bureau de la Seine (Paris). Il intègre le 20e Bataillon de Chasseurs à Pied le 3 octobre 1910. Passé au 104e Régiment d’Infanterie le 25 novembre 1910. Son service se termine le 26 septembre 1912 et il obtient son certificat de bonne conduite.
René arrive le 3 août 1914 à son régiment, le 152e Régiment d’Infanterie (appelé le 15-2). Après avoir attendu quelques jours les renforts qui viennent des Alpes, le régiment voit enfin venir l'heure de la marche en avant. Le 15 août, il attaque le village de Soultzeren (68), puissamment défendu. Les 1er et 2e bataillons s'élancent à l'assaut et balaient toute résistance devant leurs baïonnettes. Malgré le feu précis et meurtrier de l'artillerie ennemie et l’acharnement des Allemands, qui défendent pied à pied chaque maison comme une forteresse, le village est enlevé vers 19h30. Aussitôt, dans la vallée, sur les hauteurs qui la dominent, le régiment engage une poursuite, pour venger ses premiers morts. Sous la violence de ce premier choc, l'Allemand se replie en hâte, talonné par le régiment. Le soir du 17 août, après un bref combat, le drapeau du 15-2 flotte dans les rues de Munster. Le 18 août, les premières marmites tombent sur la place de la ville et les sonneries d'alerte retentissent partout, le régiment repart à l'attaque. La marche en avant est reprise par les crêtes qui dominent Munster au Nord. Le 3e bataillon a pour objectif les Trois-Épis. Tout à coup, sur une cime escarpée que dominent les ruines sauvages d'un vieux burg féodal, au Grand Hohneck, les Allemands surgissent en nombre à travers les sapins touffus. Aussitôt le combat se déchaîne et les Allemands plient sous le choc. C'est un bataillon de landsturm du 2e saxon, qui a pris la place du 171e, envoyé dans le Nord. Culbuté en un clin d'œil, il laisse le terrain couvert de morts et de blessés ; quelques fuyards à peine parviennent à leur échapper par les Trois-Épis. Mais les deux autres bataillons surviennent et la lutte reprend plus ardente et plus dure. Au bout de six heures de corps à corps et de fusillades à travers les sapins et les rochers, le 15-2 demeure maître du champ de bataille, où gisent 200 cadavres allemands. Enthousiasmés par ce succès, qui ne coûte qu'une cinquantaine d'hommes hors de combat, les soldats atteignent le lendemain tous leurs objectifs, les Trois-Épis, Turckheim, Wintzenheim, clef de Colmar. L'Allemand contre-attaque vainement pour les écarter de la ville. A Wintzenheim, le 15-2 attend avec impatience l'ordre d'entrer à Colmar. A peine défendue encore par quelques patrouilles, la ville, à 2 kilomètres d’eux, est comme entre leurs mains. Il ne faut qu'un geste pour saisir ce joyau, qui va récompenser les fatigues et les sacrifices du régiment. C'est alors qu'il reçoit l'ordre, qu'il ne s'explique pas sur le moment, d'abandonner Colmar, de retraiter dans la vallée de la Fecht, sur la ligne Griesbach—Wihr-au-Val, en avant de Munster. Arrêté en pleine victoire, le 15-2 abandonne, la mort dans l'âme, les faubourgs de Colmar, bien résolu pourtant à y revenir un jour, et trop confiant dans sa vaillance pour se résigner à cette injustice du sort. Maintenant, de mauvaises nouvelles surviennent de tous côtés : Mulhouse, deux fois prise et deux fois perdue, l'Alsace abandonnée par ses libérateurs d'un jour, Saint-Dié (88) entre les mains des Allemands. D'âpres combats se livrent au col des Journaux ; le col du Plafond et même celui de la Schlucht sont menacés. Chaque heure rend plus critique la situation du régiment, en pointe isolée dans la vallée de la Fecht. Il faut abandonner Munster (68) après Colmar. Le 15-2 se replie en combattant, et fait tête chaque fois que l'ennemi veut le presser. Le 2 septembre, le 2e bataillon est attaqué violemment près de Wihr-au-Val, et menacé d'être tourné par sa gauche. Engagée pour couvrir son flanc, la 2e compagnie se heurte, à travers des bois très touffus, aux Allemands, qui la fusillent par surprise. A la première rafale, trois de ses chefs de section tombent. Toute la compagnie se jette avec fureur sur l'ennemi, aux cris de « En avant, à la baïonnette ! » Les Allemands plient sous le choc et se débandent à travers les sapins, abandonnant une tranchée à demi creusée, et jonchée de morts et de blessés. Pendant ce temps, les 6e, 7e et 8e compagnies repoussent de violents assauts. Attaques et contre-attaques à la baïonnette se succèdent sans répit, à travers les sapins, les escarpements, les rochers, qui répercutent le fracas de la fusillade. L'Allemand épuisé s'arrête. De son côté, le 3e bataillon à Soultzbach, résiste à toutes les attaques. Ces durs engagements coûtent 2 officiers tués et 150 hommes hors de combat. Ils permettent au régiment de s'établir solidement sur les croupes qui dominent la Fecht à hauteur de Stosswihr et de Soultzeren, sur la ligne bientôt fameuse du Reichsackerkopf, du Sattel, de Soultzeren, du col de Wettstein, du Linge et du Schratzmännele. Sur ce front, le 15-2 repousse de nouveaux assauts, en particulier le 4 septembre au Sattel, où le 3e bataillon inflige de lourdes pertes aux Allemands. Déjà l'ère des batailles de position s'ouvre. Le 15-2 ajoutera sa part à la longue liste des noms de collines, de montagnes et de plaines, longtemps inconnues, fameuses maintenant à l'égal des grands champs de bataille de l'Histoire. Relevé le 12 septembre par une brigade de réserve, le régiment reçoit l'ordre de se porter à Saint-Dié (88), que la victoire de la Marne vient à peine de dégager. Cette fois, le 15-2 n'avance pas au milieu de l'allégresse d'un pays acclamant ses libérateurs. Partout sur son passage, à Fraize, Anould, Saint-Léonard, Saulcy, ce sont plutôt des vengeurs qu'appellent ces villages, ravagés par les bombardements et l'incendie, et toutes ces croix surmontées de képis rouges et bleus, qui se dressent sur la terre fraîchement remuée. Partout sur ce champ de bataille que l'ennemi vient à peine de quitter, l'image de la France meurtrie surgit devant ses défenseurs. L'ennemi, après avoir évacué Saint-Dié, se cramponne à ses portes, au massif de l'Ormont. Le 17 septembre, le régiment reçoit l'ordre de s'emparer du Spitzemberg une position très forte, en même temps qu'un observatoire menaçant. Le 2e bataillon (commandant d'Auzers) part à l'assaut de cette position et attaque vers La Beulay. Déjà, la 7e compagnie gravit les pentes du Spitzemberg et parvient à la lisière Nord du bois, mais, prise tout à coup sous un feu terrible de mitrailleuses, elle est décimée et rejetée. Malgré tous les efforts, notre attaque est brisée. Sous la pluie qui tombe en trombe, sous le bombardement meurtrier, les hommes se cramponnent au terrain conquis. Dès le lendemain, l'attaque reprend, par Charémont, directement du Sud au Nord, menée cette fois par le 1er bataillon (commandant Rousseau). Elle est vite arrêtée. Cachées dans les bois, les mitrailleuses allemandes balaient le terrain. Les hommes, cloués au sol, ne peuvent lever la tête. Les blessés, abandonnés, agonisent sur le champ de bataille. Un héros, l'infirmier Brun, de la 8e compagnie, ose en rampant aller de l'un à l'autre, et panser leurs blessures, malgré des mitrailleurs allemands, qui s'acharnent sur lui. Le 19 septembre, les 1er et 2e bataillons repartent à l'assaut de ces pentes, qu'ils abordent à l'Ouest par le col, entre la montagne d'Ormont et le Spitzemberg. Cette nouvelle tentative échoue encore. Le 20 septembre, le 1er bataillon et le 3e bataillon (commandant Contet) donnent l'assaut à 15 heures, par surprise, sans préparation d'artillerie, le 1er bataillon par Charémont, le 3e par le col. L'ennemi résiste avec sa fermeté coutumière, les flancs du Spitzemberg crachent la mitraille, mais en vain. Le commandant Rousseau arrive le premier à la clairière qui court sur le flanc Sud, à quelques dizaines de mètres du sommet, et tombe, la tête fracassée. Derrière lui, les 3e et 4e compagnies, d'un dernier élan, enlèvent la clairière à la baïonnette. Le 3e bataillon rencontre la même résistance acharnée. Les 9e et 10e compagnies prennent pied sur le sommet, et rejettent définitivement l'ennemi après des corps à corps farouches. Le Spitzemberg est pris. Ils ont fait prisonniers 80 hommes, 1 officier, et pris 2 mitrailleuses. Rendu furieux par la perte d'une position aussi âprement défendue, l'ennemi concentre sur ce piton le tir de toutes ses batteries. Une tempête de fer et de flammes s'abat sur le Spitzemberg, qui disparaît dans la fumée. Ses défenseurs, décimés, repoussent toutes les contre-attaques, mais les Allemands s'acharnent, et, vers 17 heures, le bombardement devient effroyable. Les sapins et les rochers du Spitzemberg volent en éclats, et couvrent ses défenseurs de leurs débris. Des grappes humaines gisent écrasées. Les survivants essaient en vain de s'abriter, en creusant ce sol rocailleux. Les pertes deviennent telles que le capitaine Sabate demande au colonel de retirer de cet enfer les débris de son bataillon. Mais l'ordre est donné de tenir coûte que coûte. Les braves du 4e bataillon l'exécutent stoïquement. Quand les Allemands gravissent les pentes du Spitzemberg, assurés d'en avoir anéanti tous les défenseurs, ils sont rejetés une fois de plus. La colline fut prise au prix de 8 de ses officiers et 600 hommes. Après ces combats meurtriers, le régiment commence l'apprentissage de la guerre de tranchées, qu'il mènera comme tous, si longtemps encore. Puis, le 18 décembre, au lieu du repos promis et espéré depuis longtemps, le 15-2 reçoit brusquement l'ordre de départ. Il traverse Gérardmer et poursuit sa marche vers le Sud pour franchir le 23 décembre le col d'Oderen. A peine arrivé à Fellering (68), il repart le 25 vers Bischwiller (67). Alors seulement, il apprend la tâche qui lui est réservée : il faut prendre Steinbach (68). Il est dominé de deux côtés par des hauteurs importantes, la cote 425 qui le sépare de Vieux-Thann, et le plateau d'Uffholtz, tous deux fortement tenus par l'ennemi. L'attaque prévue ne devait durer que quelques heures. Au lieu de cela, ce furent quinze terribles journées de combats sans répit, en plein hiver, sous la neige, et dans des tranchées envahies par l'eau glacée, quinze journées et quinze nuits de corps à corps. Dès le début de l'attaque, l'arrêt des troupes voisines qui doivent enlever la cote 425 et la chapelle Saint-Antoine, gêne la progression du régiment. Il faut toute l'obstination des braves du Spitzemberg (88) pour avancer pas à pas dans cette vallée encaissée, hérissée d'obstacles : barricades, abattis, ronces d'acier que les cisailles ont peine à entamer, tranchées dissimulées à ras de terre, mitrailleuses invisibles qui fauchent les assaillants. L'artillerie qui appuie le régiment est composée presque uniquement de 65 de montagne. Peu soutenu à droite et à gauche, insuffisamment appuyé par l'artillerie, le 15-2 n'a plus à compter que sur lui-même. Enfin, au prix de sacrifices et d'efforts inouïs, les tranchées se rapprochent des lisières du village, et le 15-2 prend pied dans Steinbach (68). Alors, la lutte devient d'une sauvagerie atroce : au milieu des incendies et des bombardements ininterrompus, sous la fusillade qui part des soupiraux de caves, des toits, des murs crénelés, il faut faire le siège de chaque maison. Le 27 décembre, la 4e compagnie, sous les ordres du capitaine Laroche, s'empare des décombres du Château Brûlé, et tente de forcer l'entrée du village dans une charge à la baïonnette. Arrêtés nets par un grillage vertical en fil d'acier que les cisailles ne peuvent entamer, l'adjudant Jacques et ses hommes essaient de l'escalader, et tombent frappés à mort les uns après les autres. Pourtant, emportés par leur élan, quelques braves ont pénétré dans le village. Ils y sont cernés, et succombent sous le nombre. L'un d'eux, le soldat Bourgeois, se défend seul plus d'une heure dans une rue, et tient tête aux Allemands qui essaient de l'atteindre par les soupiraux et les fenêtres. Après avoir terrassé plusieurs assaillants à coups de crosse, il parvient à se dégager et à rejoindre sa compagnie. Cet exploit de paladin paraîtrait incroyable, s'il n'était attesté par une citation. Le 28, l'attaque reprend. Le 30, la 7e compagnie, entraînée par le capitaine Marchand, force enfin l'entrée du village, lutte corps à corps à travers les barbelés et les barricades qui hérissent la grande rue, et se retranche sur place au cours de la nuit. Le 31 décembre, le tiers du village est entre nos mains. L'attaque se poursuit, malgré la mitraille qui décime les assaillants. Le 3 janvier, de nouveaux corps à corps leur livrent presque tout le village. A minuit, Steinbach était au régiment. Mais presque aussitôt, une violente contre-attaque permet aux Allemands d'y reprendre pied. Ils parviennent jusqu'à la 8e compagnie, en réserve sur la place. Surprise d'abord, elle se ressaisit, et se jette sur l'ennemi à la baïonnette. Un simple soldat, Raclot, entraîne par son ascendant une vingtaine de ses camarades, et dans la mêlée, se lance à leur tête sur l'église et le cimetière. L'ennemi chancelle sous le choc, et abandonne précipitamment le village, laissant entre leurs mains une quarantaine de prisonniers dont 2 officiers. Après quinze jours et quinze nuits de combats, où ils ont perdu 12 officiers et 700 hommes, Steinbach est enfin pris. Le 15-2 le garde avec l'énergie qu'il a mise à le conquérir. La fureur vaine des bombardements et des contre-attaques ennemies ne fait qu'achever la ruine du pauvre village, et accroître le nombre des cadavres allemands qui gisent devant ces décombres. Mais ce n'est pas surtout contre l'Allemand que le régiment doit lutter. Pour lui, l'ennemi le plus dur, c'est l'hiver. Et lorsque les survivants de cette époque parlent de l'« Enfer de Steinbach », ce n'est pas seulement aux bombardements, aux fusillades, aux corps à corps à travers les incendies qu'ils songent. Ils revoient les tranchées à demi effondrées, où ils restèrent stoïques, dans l'eau jusqu'aux genoux, au milieu des glaçons ; ils revoient les longues nuits d'hiver, où la neige ensevelissait les guetteurs aux créneaux ; les corvées et les relèves à travers les fondrières des boyaux ; la lutte contre le froid qui les terrassait lentement ; le calvaire de leurs camarades, qui, les pieds gelés, se traînaient encore, jusqu'au jour où il fallait les emporter de la tranchée. Tant de souffrances et de misères, telle était la guerre pour ces humbles héros de la tranchée, dont on ne connaissait pas alors le martyre. Et plus que des ordres d'attaque, plus que des récits d'assauts ou de combats, ces simples ignés, tracées en marge du journal de marche du 15-2, ont quelque chose de grand et de poignant : « Par suite de la fatigue extrême et de l'état des tranchées où les hommes sont dans l'eau et dans la boue jusqu'aux genoux, les évacuations pour pieds gelés sont très nombreuses. L'effectif tombe à 1.800 hommes, sur 3.200. » Après les dures journées de décembre, janvier et février s'écoulent sans incidents. Le secteur est calme, et les bataillons du 15-2 se succèdent au repos à Bischwiller, dans la vallée de la Thur. Vers le Sud, l'artillerie allemande tonne avec un acharnement croissant. Et assis sous le manteau des hautes cheminées alsaciennes, au coin du feu, les soldats entendent prononcer pour la première fois un nom bientôt glorieux et tragique, un nom qu'ils inscriront en lettres d'or sur la soie de leur drapeau : I' « Hartmannswillerkopf » ! L'Hartmannswillerkopf, le « Vieil Armand », l'« H.W.K. », comme on l'a appelé au cours de la guerre, est un contrefort des Vosges, qui tombe à pentes escarpées sur la plaine d'Alsace, presque en face de Mulhouse. Sorte de presqu'île terminale, détachée de la chaîne à l'est de la vallée de la Thur, il n'est relié au ballon de Guebwiller que par le Molkenrain (1.125 mètres). A ses pieds, l'Alsace étale à perte de vue le riche tapis de ses champs et de ses vignobles. Au premier plan, Wuenheim, Hartmannswiller, Obwiller, Soultz, Guebwiller, Bollwiller, puis la forêt de Nonnenbruch, fameuse pour la richesse de ses mines de potasse. Plus loin Mulhouse, qui semble si proche qu'on peut à la jumelle en distinguer nettement les rues. Plus loin encore, par-delà la forêt de la Hart, le Rhin, le fleuve sacré, dont le mince filet d'argent fascine les regards. Dans le lointain enfin, la Forêt-Noire, toute semblable aux Vosges, dont le sombre profil s'illumine le soir au soleil couchant, et s'évanouit ensuite dans une brume violette. Et plus au Sud, vers la Suisse, les Alpes, leur sommet scintillant au soleil, les blanches aiguilles du Finsteraarhorn et de la Jungfrau. L'Hartmannswillerkopf n'était hier qu'un belvédère pittoresque. Quand, plus tard, du Molkenrain, le voyageur jettera sa vue sur ce modeste promontoire des Vosges, il se demandera pourquoi tant de milliers d'hommes se sont pendant la guerre disputé ces pentes. Sans doute le Français, en l'occupant, tient sous son canon la plaine d'Alsace jusqu'à Mulhouse. L'Allemand, en le défendant, conserve un notable morceau de cette terre d'Empire à laquelle il tient tant ; il menace en même temps cette vallée de la Thur qu'il ne se console pas d'avoir perdue. Mais il y a autre chose... Ce que tant de régiments, et plus que les autres le 15-2, ont écrit sur le rocher fameux où ils se sont sacrifiés, c'est le même serment que l'armée française a répété à Vauquois, aux Éparges, à Tahure, sur l'Yser... C'est, dans un temps où l'issue de la guerre était lointaine et douteuse encore, où les armées de France et d'Allemagne s'étreignaient sans pouvoir s'ébranler. La même volonté animait les deux camps, et peu à peu, l'Hartmannswillerkopf a pris sur les fronts de l'Est la valeur d'un symbole qui dépassait de beaucoup la valeur même de la position. L'abandonner, c'était avouer son impuissance ; et jamais la France, aux heures les plus tragiques, n'a voulu laisser croire à l'Alsace qu'elle renonçait à la libérer. Voilà pourquoi l'année 1915 verra tant de combats et tant d'hécatombes sur cette cime, hier presque sans nom. Lorsque, après de longs mois, dans une autre phase de la guerre, la bataille s'apaisera dans les Vosges, lorsque les efforts surhumains déployés de part et d'autre se seront annihilés en s’égalant, l'Hartmannswillerkopf, tant de fois pris et repris, restera entre les deux lignes, pelé, bouleversé, domaine sinistre des morts, où les tombes mêmes sont destinées à mourir. Voilà pourquoi aussi, aujourd'hui, à l'égal des plus beaux noms de victoires, l'Hartmannswillerkopf résonne comme un écho de tous les héroïsmes français. Voilà pourquoi, plus que tout autre, le 15-2 a le droit de l'entendre et de le redire avec fierté, car nul corps n'y a versé autant de sang, ni déployé plus de bravoure.
En janvier 1915, ce sommet n'était tenu que par un peloton de chasseurs. Les Allemands, par surprise, cernent et réduisent cette unité isolée. Maîtres de l'Hartmannswillerkopf, leur génie d'organisation en fait bientôt une forteresse qui brise tous les assauts de la 1re Brigade de chasseurs, appelée en hâte pour reprendre le sommet, épuisées, décimées, ces troupes d'élite, malgré leur héroïsme, s'arrêtent impuissantes. L'Hartmannswillerkopf restera-t-il donc aux mains des Allemands ? Ce n'est pas possible ! Le 15-2 est là derrière, se reposant de ses victoires du Spitzemberg et de Steinbach. A lui revient l'honneur d'en finir. C'est le 22 mars 1915, à l'aube d'une belle journée glaciale, que le 15-2 reçoit l'ordre d'attaquer. Le 1er bataillon (commandant Sermet) a pour objectif la crête de l'Hartmannswillerkopf, le 2e (commandant d'Auzers), les pentes Nord, le 7e Bataillon de Chasseurs alpins, les pentes Sud ; le 3e bataillon est en réserve. L'attaque est précédée d'un bombardement précis et formidable. Au-dessus des lignes, les obus de 220 passent avec un long bourdonnement, et s'abattent sur les tranchées allemandes, où ils éclatent en volcans. Le sommet de l'Hartmannswillerkopf est comme en proie à une éruption. L'artillerie allemande répond sur les tranchées. A travers la fumée et les flammes, des sapins entiers, des blocs de granit sont projetés pêle-mêle avec des corps humains et retombent lourdement. La montagne tremble. Enfin, quinze minutes avant l'attaque, des rafales de 75 sifflent et crépitent sur toute la crête. L'ouragan d'artillerie est à son paroxysme. C'est alors, aux sonneries ardentes des clairons que les fantassins bondissent, la baïonnette haute, à l'assaut de la forteresse. A travers le fouillis des réseaux barbelés à demi détruits, des tranchées effondrées, l'enchevêtrement des sapins abattus, ils pénètrent de tous côtés, comme un flot, dans la position ennemie, dépassent la première et la deuxième tranchée. Mais il faut s'arrêter là : à droite et à gauche sur les pentes, les bataillons d'assaut sont arrêtés par des tranchées invisibles, où l'artillerie n'a pu leur frayer un passage. Au Nord, la 6e compagnie, en débouchant d'une clairière, se heurte à des réseaux profonds et intacts. Elle essaie d'avancer quand même, et cherche à se frayer des passages dans la broussaille de fer où la mitraille couche un à un tous ses héros. De l'héroïque compagnie, il ne reste plus qu'une poignée d'hommes, qui s'accrochent farouchement au terrain conquis. Plus au Nord, la 5e compagnie est arrêtée elle aussi devant les réseaux intacts. Déjà blessé pendant l'attaque, le sous-lieutenant Pasquier s'élance le premier pour entraîner de nouveau ses hommes sur les barbelés allemands. Cette folie échoue sous la mitraille, et les corps restent trois jours accrochés devant la tranchée ennemie. Sur les pentes Sud de l'Hartmannswillerkopf, le 7e Alpins, fauché par une fusillade meurtrière, ne parvient pas à déboucher de ses tranchées. Il n’a pas pu atteindre le sommet. Quatre contre-attaques essaient en vain de leur reprendre les tranchées conquises. Plus de 400 cadavres allemands gisent devant les lignes. Ils ont pris 200 hommes, 3 officiers, deux lance-bombes et une mitrailleuse. Les pertes sont de 260 hommes et 9 officiers hors de combat. Le 26 mars, sous la neige, le régiment reprend l'attaque, les 1er et 3e bataillons (commandant Bron) en première ligne, appuyés au Sud par le 7e alpins. La préparation d'artillerie a été puissante. Au moment où le sommet de l'Hartmannswillerkopf disparaît dans la fumée et la flamme des éclatements, les vagues d'assaut, accompagnant les dernières rafales de 75, bondissent de leurs tranchées, déferlent jusqu'au sommet, qu'elles submergent comme une écume bleue. Leur élan est si impétueux qu'elles dévalent encore les pentes vers l'Alsace. C'est là que tombe héroïquement le clairon Poissenot, frappé à mort en sonnant une charge éperdue à la tête de ses camarades. C'est là que le lieutenant Priquet, qui s'est déjà distingué au Spitzemberg (88) et à Steinbach (68), prend dans la mêlée le commandement de sa compagnie et l'entraîne dans un nouvel assaut. Du haut des rochers, les mitrailleurs ardents à suivre la première vague, enthousiasmés par l'exemple de leur chef, le lieutenant Jenoudet, qui, blessé, veut faire l'attaque jusqu'au bout, traquent par leurs rafales les Allemands en fuite. Et cette fois, l'ennemi est culbuté par la violence de l’assaut. Il leur abandonne toute la position, sol sacré où les morts de la dernière attaque reposent dans leur linceul de neige sanglante. Il laisse entre nos mains 140 prisonniers dont 3 officiers, un champ de bataille jonché de cadavres, de gros dépôts d'armes et de munitions. Le régiment a perdu en tués ou blessés 240 hommes, dont 3 officiers. Le 27 mars, dans une émouvante et simple cérémonie, le général Serret décore de la Médaille militaire le soldat Auberger, qui a pris pied le premier au sommet de l'Hartmannswillerkopf. C'est dans les tranchées de première ligne encore toutes bouleversées, sous le sifflement des balles, devant quelques soldats hâves et boueux, que le général accroche le beau ruban à la poitrine de ce brave. Un feu de salve sur les Allemands remplace la sonnerie d' « Ouvrez le ban », un second celle de « Fermez le ban ». Et sur son drapeau, à côté de l'étoile d'or du Spitzemberg et de la palme de Steinbach, le 15-2 peut fixer une nouvelle palme, juste récompense de ses exploits à l'Hartmannswillerkopf. Le massif tout entier avec ses contreforts est maintenant à eux, et les vainqueurs ont à leurs pieds la terre promise. Par-delà les broussailles de fer, par-delà l'horreur des espaces ravagés, nos guetteurs ne voient plus que la belle et riche plaine, cette Alsace qui est leur et dont on leur a tant parle. Même lorsque la nuit, des Vosges à la Forêt-Noire, tombe sur l'immense horizon, le spectacle reste magique. De toute part dans la plaine obscure des feux s'allument comme des reflets d'étoiles. Du haut de son rocher, le soldat rêve, en voyant scintiller les lumières de Mulhouse et de Bâle. Sur cette terre de solitude et de mort, où tant de ses camarades sont tombés, il songe à ces foyers qui brillent anxieux dans la nuit, et qui semblent lui faire signe. Quand sonnera-t-elle, l'heure de répondre à cet appel, et de descendre dans la plaine en libérateurs ? Mais l'Allemand ne veut pas s'avouer vaincu. Rejeté des pentes de l'Hartmannswillerkopf, il surveille âprement cette proie qu'on vient de lui arracher, et le 25 avril, lorsque les derniers échos de la bataille se sont tus et que le calme est revenu sur la montagne sanglante, il tente un grand coup pour la ressaisir. Un bombardement foudroyant éclate à midi comme un orage. Jamais, pas même au Spitzemberg, les soldats n'en avaient subi de pareil. Les plus gros calibres des artilleries allemandes et autrichiennes : 210, 250 et jusqu'aux 305, concentrent leur tir sur l'Hartmannswillerkopf. Sous cette tempête d'explosifs, la vieille montagne, comme en proie à quelque cataclysme souterrain, s'enveloppe de nouveau de flammes et de fumée. Couchés sur le sol qui tremble, les hommes attendent stoïquement la fin de la tempête ; mais le bombardement s'acharne toujours. Détachés du sommet de la montagne, des blocs de granit roulent en avalanche et broient tout sur leur passage. Les tranchées en pierres sèches, accrochées au flanc de l'Hartmannswillerkopf comme des balcons, volent en éclats. Pourtant, les poilus du 15-2 tiennent toujours. Entourés de morts et de blessés, épuisés, haletants, couverts de terre et de sang, les mains crispées sur leur fusil brûlant, quatre fois ils repoussent les assauts de l'ennemi. Six bataillons d'élite de l'armée allemande essaient vainement jusqu'à la fin de l'après-midi de prendre pied sur l'Hartmannswillerkopf. Les pentes de l'Hartmannswillerkopf vers l'Alsace se divisent en deux contreforts, que le troupier appelle les deux cuisses. Chacune était défendue par un bataillon, le 3e bataillon au milieu, tenait le Ravin. Vers 18 heures, après six heures de bombardement et cinq tentatives d'assaut, les Allemands prennent pied sur les deux contreforts. A l'abri de l'arête, qui les cache aux défenseurs du Ravin, ils s'avancent vers le sommet. Bientôt, leurs deux colonnes, comme une marée montante, atteignent les crêtes et se réunissent près de la cote 956, cernant ainsi les défenseurs du Ravin, qui tiennent toujours. Attaquée de tous côtés par l'ennemi qui la domine, sans cartouches et sans vivres, n'ayant plus que ses baïonnettes pour se défendre, cette poignée d'hommes tombe aux mains des Allemands. Quelques-uns seulement parviennent à s'échapper ; tel le soldat Chassard, qui venu jusqu'en première ligne à travers les bombardements, pour porter à manger à ses camarades, et tombé au milieu des Allemands, saisit un fusil, abat ceux qui l'approchent et se fraie un passage à travers les assaillants décontenancés. Tel encore le caporal Coulon, qui rallie quelques hommes et fonce sur les Allemands qui lui crient de se rendre. Ces braves s'échappent en sautant de rocher en rocher, au milieu des balles qui ricochent, font les morts jusqu'à la nuit et regagnent les lignes en rampant, à la lueur des fusées rouges que l'ennemi lance du haut de l'Hartmannswillerkopf pour faire allonger le tir de son artillerie, et qui éclairent sinistrement ce crépuscule de bataille. Appelées en toute hâte, les dernières réserves du régiment se jettent à corps perdu dans la fournaise. Sauver l'Hartmannswillerkopf ! Tel est le mot d'ordre qui anime cette poignée d'hommes. La nuit qui tombe, le terrain bouleversé, les bombardements qui s'acharnent autour de la montagne, tous les obstacles de cette situation désespérée, n'empêchent pas les derniers soldats du 15-2 d'élever avec leurs poitrines la digue contre laquelle la ruée allemande vient se briser. Tant d'obstination a forcé le sort. Ils restent cramponnés autour du sommet, et, le 26 avril, les débris du 15-2, aidés de deux bataillons de chasseurs, s'emparent de nouveau de la montagne. L'Hartmannswillerkopf est demeuré Français. Mais cette gloire est chèrement payée. 14 officiers, 800 hommes, manquent à l'appel, tués ou prisonniers. Après un mois de repos à Saint-Amarin et à Malmerspach, le 15-2 s'est reconstitué. Le souvenir des morts, la tradition du Spitzemberg, de Steinbach et de l'Hartmannswillerkopf, ont donné une seule âme aux renforts venus de tous côtés. Dès le 15 juin, le régiment est de nouveau dans la mêlée. Pendant que les 1er et 3e bataillons tiennent l'Hartmannswillerkopf, c'est le 2e bataillon (commandant d'Auzers) qui a l'honneur d'entrer le premier dans la bataille. Il s'agit d'appuyer l'attaque des 68e et 27e bataillons de chasseurs dans la vallée de la Fecht, en débouchant entre Sondernach et Metzeral. Dès le premier jour, le 2e bataillon se heurte à un ennemi fortement organisé et qui résiste avec acharnement. Les 5e et 6e compagnies sortent de leurs tranchées avec leur élan coutumier, mais pendant les journées des 15 et 16 juin, les mitrailleuses allemandes et les obstacles accumulés brisent tous leurs efforts. Après un court répit, l'attaque reprend le 18 juin, sans appui de l'artillerie. Deux fois dans la journée, le bataillon part à l'assaut, pour gagner 500 mètres, au prix de quels sacrifices ! Les pertes sont telles qu'il faut appeler en renfort un bataillon du 81e d'Infanterie. Mais dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, le 15-2 reste toujours égal à lui-même. Chaque jour, comme à Steinbach, il reprend ses attaques et resserre son étreinte autour de l'ennemi qui le meurtrit. Tant d'abnégation et de ténacité forcent enfin le sort du combat, et, le 22 juin, le 2e bataillon s'empare de Sondernach en flammes. Plus heureux, le 3e bataillon (commandant Bron) appelé à son tour à prendre part à l'attaque du 13e Bataillon de Chasseurs alpins sur la crête de Mattle, face à Sondernach, le 17 août 1915, s'empare d'un seul élan des tranchées du bois de Mattle. Après ces deux attaques, le 3 septembre, le 15-2 descendait au repos à Saint-Amarin. Cette période de repos fut marquée par une cérémonie simple et émouvante dont le 15-2 aime à rappeler le souvenir : c'est le 7 septembre, à Saint-Amarin, que le général Serret attache à son drapeau les deux palmes et l'étoile d'or conquises en quelques mois de guerre. Venus de tous les villages de la vallée, Alsaciens et Alsaciennes, toute la grande famille du 15-2, entourent en foule nos soldats. Et lorsque vibre la sonnerie Au drapeau et que le régiment se raidit en un seul éclair d'acier, on dirait qu'un souffle imperceptible fait frissonner les grandes ailes noires des coiffes alsaciennes. Bien des yeux s'embrument de larmes, et de vieilles mains de vétérans de 1870 tremblent en essayant un salut militaire. C'est l'étreinte muette de l'Alsace française et de ses libérateurs. Dès le 10 septembre, le 15-2 reprenait les lignes à l'Hilsenfirst. II devait y rester trois mois. Ce long séjour ne fut marqué par aucun événement saillant. Est-ce à dire que le 15-2 vécut des jours faciles ? Non certes. La vie de secteur est déprimante pour les hommes. On ne s'est peut-être pas rendu compte à l'arrière des fatigues et des souffrances de toute sorte que les soldats enduraient dans les tranchées, même les plus confortables. Le laconisme monotone des communiqués : « Journée calme, rien à signaler », quand il n'impatientait pas le public, le réjouissait. « C'est du bon temps pour les poilus », pensait-il. Le public ne savait pas... La lecture du journal de marche du régiment est à ce point de vue singulièrement suggestive. Il est probable que pendant le dernier trimestre de 1915 le communiqué n'a pas mentionné une fois le nom de l'Hilsenfirst. Et pourtant, tous les jours, le journal de marche enregistre des bombardements et des fusillades ; et tous les jours, comme un refrain cruel et monotone, ces mots reviennent : Tués... Blessés... Les tranchées de Hilsenfirst sont bombardées, l'ennemi les écrase à coups de grosses torpilles, qui projettent, en percutant sur le roc, des milliers d'éclats de pierre, plus dangereux encore que les éclats de fonte. Parfois, elles tombent sur un abri qui s'effondre, et les hommes, épuisés, abrutis par le bombardement, doivent porter secours à leurs camarades ensevelis, réparer la tranchée bouleversée. Les nuits se passent à travailler, à guetter aux créneaux, à rôder en patrouille entre les lignes. Du matin au soir, Français et Allemands s'épient, se fusillent, engagent de petits postes à petits postes des combats à la grenade. Et, pendant ce temps, le terrible hiver des Vosges sévit également sur les deux adversaires. La neige comble les tranchées, puis le dégel survient et change les hommes en blocs de boue. Pour ceux qui bataillent avec le régiment depuis août 19 14, chaque journée ajoute ses fatigues à toutes celles qui s'accumulent déjà, à celles du Spitzemberg, de Steinbach et de l'Hartmannswillerkopf.
En 1915, le système des relèves périodiques n'est pas encore établi. Non seulement, si loin qu'ils puissent regarder, les hommes n'aperçoivent pas la paix, mais ils n'ont même pas la ressource de compter les jours qui les séparent de la relève, du repos au cantonnement. Ils ont froid, ils dorment à peine, la vermine les dévore ; et tous les jours ils voient tomber les camarades. Les rares poilus du 15-2 qui ont survécu ne veulent pas croire aujourd'hui qu'ils ont connu toutes ces misères, et surtout qu'ils les ont supportées sans se plaindre.
Le 4 octobre 1915, il passe au 15e Bataillon de Chasseurs à Pied qui se trouve aussi en Alsace. Le 15 octobre, le régiment occupant le secteur de Rehfelsen perd quelques éléments de tranchées. Les 4e et 6e compagnies du 15e, alors au repos, contre-attaquent et, malgré une résistance acharnée de l'ennemi, reprennent la majorité du terrain. Le lendemain, l'ordre arrive de reprendre à tout prix le sommet de l'Hartmann, dont l'ennemi s'est emparé. Le reste du bataillon, cantonné à, Moosch, monte en ligne, et, malgré le feu des mitrailleuses, les 1re et 5e compagnies, appuyées par la 2e compagnie, s'élancent, occupent et dépassent les positions de première ligne allemandes, en faisant 50 prisonniers, et dégagent une compagnie d'un corps voisin, entourée depuis vingt-quatre heures par l'ennemi. Le sommet de l'Hartmann reste entre leurs mains, malgré les bombardements furieux et les contre-attaques de l'ennemi. Le 21 décembre, les 3e, 5e et 1re compagnies s'élancent à l'assaut du Rehfelsen. La 1re, dont le chef vient d'être enterré par un obus, tournoie un moment, puis reprend le mouvement et s'empare d'une mitrailleuse ; les trois compagnies s'installent dans la deuxième ligne allemande. La 6e compagnie, prise dans des réseaux, est violemment mitraillée et le capitaine AMIC tombe en tête de sa troupe : ses chasseurs le vengent, prennent une mitrailleuse et font 60 prisonniers. Le soir, la position est retournée ; 100 prisonniers dont 3 officiers restent entre leurs mains. Le lendemain, une contre-attaque violente refoule les éléments avec qui le bataillon est en liaison à, droite. Toutes les unités du 15e renforcent la ligne ; trois contre-attaques successives de l'ennemi restent vaines et laissent le terrain en notre pouvoir.
Pour 1916, le 15e va désormais tenir successivement les secteurs du Sud de l'Hartmannswillerkopf et du Reichaker, travaillant, patrouillant sans relâche. Il monte une garde vigilante sur les crêtes qui lui sont confiées et, malgré les luttes à la grenade de chaque jour, des bombardements violents et répétés par torpilles et obus de gros calibre, conserve toujours sa bonne humeur et son bon, esprit.
René rejoint le 3 juin le 16e Bataillon de Chasseurs à Pied, 5e compagnie. Le 9, il monte en secteur à Reillon (54), où il doit résister à un coup de main de grande envergure de l'ennemi, qui cherchait à pénétrer dans ses lignes. Le 21 juillet, il occupe, un peu plus à l'Ouest, le secteur de Vého, bouleversé par les mines, qu'il réorganise jusqu'aux premiers jours d'août. Après une période d'entraînement au camp de Saffais, il va participer à son tour à la bataille de la Somme. Le 19 septembre, le bataillon vient en réserve de division à l'Ouest du village de Rancourt (55). L'attaque se déclenche le 25 au matin et le bataillon est toujours en réserve, mais le soir il monte en première ligne pour remplacer le 94e Régiment d’Infanterie, qui avait échoué dans l'attaque des lisières du Bois de Saint-Pierre-Vaast (80). Malheureusement, il en fut de lui comme du 94e, malgré plusieurs attaques répétées, il ne put prendre pied aux lisières du bois. Le 28, il est relevé et va se reformer à Hailles, dans la Somme. Revenu à la bataille, du 26 octobre au 5 novembre, dans un cloaque de boue, au milieu des ruines de Sailly-Saillisel, le bataillon progresse pas à pas au prix d'efforts surhumains. Le 29 octobre, des organisations ennemies se sont révélées à l’église entre Sailly-Saillisel et Saillisel et au point 1486, il importe essentiellement de les détruire ainsi que celles qui relient entre eux ces deux points ; en conséquence l’artillerie divisionnaire 42 prépare un tir de 75 et d’artillerie lourde sur les organisations indiquées. En prévision de ce tir les commandants des 1re, 2e et 3e compagnie reçoivent l’ordre de replier le 29 à 6h. Dans chaque section un ou deux guetteurs sont laissés à la garde des tranchées ainsi que deux mitrailleuses l’une à la 1re compagnie, l’autre vers la gauche de la section de la 2e compagnie restant en 1re ligne. Des abris leur sont creusés pendant la nuit pour les protéger des éclats. Le tir de l’artillerie commence à 6h et finit à 18h. Suite au tir, des reconnaissances sont envoyées, elles indiquent que sur tout le front du bataillon, les organisations ennemies sont restées intactes. Le lendemain, l’artillerie ennemie se déchaîne pendant que des soldats travaille énormément dans une tranchée. Le bataillon travaille également à l’aménagement des tranchées mais le mauvais temps empêche toute organisation sérieuse. Le 31, à 10h50 commence un violent bombardement sur tout le secteur occupé par le bataillon. Il continua jusqu’au lendemain 6h.
René a disparu à Frégicourt-Maurepas, durant ces bombardements. Un jugement déclaratif fixe sa mort au 31 octobre 1916.
Citation pour la médaille militaire publiée au journal officiel du 10 mai 1922 : « brave chasseur. Tombé au champ d'honneur le 31 octobre 1916 à Maurepas en se portant courageusement à l'assaut des positions ennemies. Croix de guerre avec étoile d'argent ».